Dani Olivier est un photographe français qui se spécialise dans la photo de nu.
Mais il ne se contente pas de photographier des modèles en tenue d’Eve. La particularité des clichés qu’il prend réside dans les formes abstraites qu’il projette sur les corps de ses sujet, leur donnant une dimension psychédélique.
Nous avions déjà traité du travail du photographe dans un précédent article, et aujourd’hui, Dani Olivier nous parle de son travail si particulier à l’occasion de nouvelles prises de vue dans un interview exclusive :
Pourriez-vous nous parler un peu de vous et de votre parcours de photographe ?
J’ai commencé à me passionner pour la photographie argentique et le développement durant mes études. Avec un groupe d’amis nous passions parfois tout notre week-end en chambre noire à agrandir nos images. Après un break de quelques années, j’y suis revenu. C’était au début du numérique en 1999.
J’ai travaillé de 2002 à 2006 sur un projet de selfies (qui ne portait pas encore ce nom) : je demandais aux modèles de faire leur autoportrait nue avec un appareil compact. Elles n’avaient pour la plupart, jamais utilisé d’appareil numérique, et encore moins réalisé d’autoportrait.
Mon objectif était de capter un instant précis et unique qui ne se reproduirait plus jamais ensuite : celui de leur tout premier autoportrait. En regardant les images laissées dans l’appareil, il paraissait évident que l’autoportrait deviendrait un style à part entière. J’ai « photographié » ou plutôt « fait se photographier » ainsi une centaine de modèles.
En parallèle, je recherchais un style graphique, un espace créatif dans lequel je pourrais développer un regard personnel et des images uniques.
J’ai commencé à mettre les modèles en mouvement pour créer des effets de trainées de lumière dans l’espace, à tester des déformations optiques, puis à projeter des images sur leurs corps. Rapidement, j’ai décidé de me consacrer totalement à ce projet de « nus abstraits » et j’y travaille encore aujourd’hui.
Pouvez-vous nous parler plus en détails de votre travail ? Qu’est-ce qui vous inspire ?
Je suis un processus expérimental, je projette des images sur mes modèles, observe le résultat, modifie les paramètres (images, gestuelles, mouvements) pour optimiser le résultat ou simplement pour progresser dans une nouvelle direction intéressante.
J’aime développer et étudier la part du rationnel dans l’esthétique, avancer selon une démarche presque scientifique, étape par étape. J’aime aussi sentir que les images et effets que je découvre sont inédits et apparaissent pour la première fois. C’est ma plus grande satisfaction, et ma motivation principale.
Ce qui m’inspire : la peinture impressionniste et le surréalisme, les belles expositions contemporaines.
Comment obtenez vous de tels effets sur vos photos ?
Je mélange plusieurs effets lors de la prise de vue : des projections d’images, les gestuelles des modèles, des mouvements de l’appareil ou du zoom, des déformations optiques par l’utilisation de grand-angle. J’ai donné des noms à ces différentes techniques : mouvogramme pour les photos en mouvement, projogramme pour les projections d’images, linéogramme pour les projections de lignes.
Je ne retouche pas mes images, à part le fond noir qui est densifié. Le défi est précisément d’obtenir des images étonnantes uniquement avec des effets spéciaux lors de la prise de vue, et sans retouche.
Comment trouvez-vous vos modèles ?
J’organise des castings où les modèles viennent par le bouche à oreille, le plus souvent d’anciens modèles en amènent de nouveaux. J’ai aussi des candidatures spontanées.
Mes nus dissimulent les détails du corps plus qu’ils ne le dévoilent. Ils mettent en avant ses lignes et ses formes. Du coup, les modèles sont en totale confiance. Elle savent que leur image sera magnifiée. En pratique, j’ai beaucoup plus de candidatures que de temps pour toutes les photographier.
J’ai lu que vos modèles participaient activement à tout le processus du développement photo, pourriez-vous nous parler de la relation que vous avez avec vos modèles lors de vos shootings ?
Ma communication avant les prises de vue vise à bien leur faire comprendre les paramètres techniques : rester dans la zone de mise au point des projections, vitesse et rythme des gestuelles. Angle du corps par rapport à l’éclairage. Je détaille en amont le vocabulaire que je vais utiliser pour les diriger. Pas toujours facile car la communication se fait souvent en anglais.
Pendant la prise de vue, j’alterne des périodes de contrôle précis des poses avec des temps où je les laisse s’exprimer librement. Après la séance je regarde les photos avec elles. Je leur demande de choisir les 5 qu’elles préfèrent. Cela m’enrichit d’avoir leur regard sur elles-mêmes et sur mes images.
Parfois, si le modèle le souhaite, ou si elle est graphiste, je lui demande en amont de créer de images à projeter sur elle-même, j’appelle cela des « créagrammes ».
Quel matériel utilisez vous pour vos séries ? Utilisez-vous un logiciel de retouche ?
J’utilise un Canon EOS 5D MarkIII. Mes objectifs préférés sont les zooms 70-200mm et le 17-40mm. Je développe les photos avec Lightroom. Je limite mon intervention à ce que j’aurais su faire en chambre noire, c’est-à-dire, ajustement des contrastes et des noirs.
Dani Olivier : Site
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