Entre ombres et lumières, Dominic Dähncke se joue de notre regard. Le photographe, originaire des Iles Canaries, s’est trouvé dans la photographie après avoir eu diverses expériences professionnelles. La photographie lui permet d’exprimer de manière visuelle ce qu’il ressent. Pour cette série photo en noir et blanc, Dominic a profité de l’isolement dû au COVID pour explorer sa créativité ainsi que son côté sombre, un « imposteur » qui serait en lui, par le biais des ombres. Prises sur le toit de son immeuble, seule ouverture sur le monde extérieur durant cette période, ces photographies apparaissent comme une passerelle entre la réalité et l’imaginaire.

Découvrez tout de suite notre interview exclusive.

photographie noir et blanc Dominic Dähncke
© Dominic Dähncke

Pouvez-vous nous en dire plus sur vous et sur ce qui vous a amené à la photographie ?

Je suis né sur l’île de La Palma (îles Canaries) en 1982. J’y suis né parce que ma mère et ma grand-mère (toutes deux allemandes) sont tombées amoureuses de l’île après des vacances et ont tout laissé derrière elles pour y commencer une nouvelle vie. Ma grand-mère est mycologue et elle avait toujours des appareils photo avec elle pour documenter toutes ses découvertes de champignons. Cela a certainement aidé ma mère et moi à hériter d’un appareil photo et d’un hobby, la photographie.

Devenu adulte, j’ai étudié l’informatique, je suis devenu entraîneur de football, entre autres expériences, et l’appareil photo était toujours avec moi. C’est en 2014 que j’ai décidé d’écouter mon enfant intérieur et de me lancer en tant que photographe professionnel. J’ai quitté mon emploi de formateur et je suis devenu photographe indépendant.

Avec le temps, j’ai réalisé que rien ne m’a amené à la photographie. J’ai l’impression que la photographie a toujours été en moi. C’est difficile à expliquer. Mais c’est ainsi. Je pense que mon seul mérite est d’avoir écouté cette énergie accumulée en moi. Tout le reste a été un processus naturel.

D'où vous est venue l'idée de cette série ? Que représente-t-elle pour vous ?

Cette série a vu le jour pendant le confinement du COVID. Je vis dans un immeuble, le toit est donc devenu mon espace de respiration. Il y avait (et il y a toujours) une vieille chaise qu’un voisin avait laissée là il y a des années. Inconsciemment, j’ai commencé à jouer avec mon ombre sur la chaise et la première photo est celle où je suis assis dessus. C’est à partir de là qu’ont émergé les autres photos sur le toit. L’enfermement a été très long et j’étais ravi.

Cette série m’a permis de réaliser que nous, photographes, avons tendance à nous saboter nous-mêmes en nous disant que pour faire de bonnes photos, il faut aller loin, dans des endroits exotiques. Dans mon cas, j’aime la photographie de rue et conceptuelle, je pensais qu’il fallait partir loin (New York, Inde ou Paris) pour pouvoir faire de la photographie qui en valait la peine. Grâce au COVID et à mon toit, j’ai découvert que ce n’était pas nécessaire.

photographie noir et blanc Dominic Dähncke
© Dominic Dähncke

En regardant ces photographies, on suppose qu'il s'agit d'autoportraits. Si c'est le cas, ce choix a-t-il une signification particulière pour vous ?

Cette série représente pour moi mon côté sombre, mon imposteur. Ce personnage qui vit en moi et qui me déteste, qui me dit toujours que je fais mal les choses, que ce que je fais n’en vaut pas la peine. C’est mon côté « haineux ». D’une certaine manière, j’utilise cette série pour rendre ce côté détestable visible et ridicule.

photographie noir et blanc Dominic Dähncke
© Dominic Dähncke

Pourquoi photographiez-vous en noir et blanc pour cette série ?

Je reviens au concept de processus naturel. L’édition de ces photos en noir et blanc n’a pas vraiment d’intention spécifique. C’est juste quelque chose qui s’est fait naturellement. J’évite les concepts répétitifs qui prétendent que le noir et blanc « nettoie » tout ce qui détourne l’attention de la photo. Lorsque j’édite les photos sur mon téléphone portable, je fais un test en couleur et un autre en noir et blanc. Et pour cette série, c’est toujours la version en noir et blanc qui l’emporte. Il y a quelque chose dans mon subconscient qui ne m’aide pas à l’expliquer logiquement. Mais en résumé, je pense que c’est parce que l’ombre prend le dessus. 

Comment construisez-vous vos images ? Quel est votre processus artistique et créatif ?

Mon seul processus est d’être ouvert à ce que je rencontre. 90% de mes photos sont des situations trouvées, et puis il y a 10% où j’ai influencé (placer un masque pour créer une ombre, incliner un balai en diagonale…). Je ne fais pas de croquis, je n’ai pas d’idée préconçue. Je suis finalement plus un pêcheur qu’un créateur. Il est vrai que parfois je rencontre une situation (une certaine lumière sur un certain objet ou une certaine personne) et, dans le cas où j’aurais l’occasion de revenir à une autre heure ou un autre jour, j’imagine une heure exacte pour que la lumière du soleil ait un certain angle, par exemple.

Je dois avouer que j’aimerais être plus créatif. J’ai peu de références photographiques, mais l’une d’entre elles est Chema Madoz, et j’aimerais un jour avoir cette capacité à créer des métaphores à partir de natures mortes.

Le photographe Dominic Dähncke
Le photographe Dominic Dähncke

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