Shervine Nafissi est un photographe suisse. Âgé d’une trentaine d’années, il possède un doctorat en droit, domaine dans lequel il s’est engagé avant de se rendre compte que cette voie ne lui correspondait pas. Cette période lui aura toutefois permis de rencontrer la photographie, par le biais d’un collègue passionné. Lui offrant ce qui lui manquait pour pouvoir raconter des histoires et s’exprimer sur divers sujets, Shervine devient photographe professionnel en 2018. Sa série Noora, du prénom de sa fille, explore l’enfance et la paternitéle passé et le présent, le lien entre le Père et la Fille. Manière de figer à jamais son propre monde, Shervine nous partage avec poésie et douceur cette relation père-fille illustrée par des scènes de vie dévoilées avec pudeur par le photographe.

Shervine Nafissi explore sa paternité
©Shervine Nafissi

La photographie est devenue pour Shervine un outil d’expression et d’introspection. Il s’emploie à la réalisation de projets commerciaux en parallèle de projets personnels à travers lesquels il dévoile son regard artistique et ses opinions. Il a notamment couvert la grève des Femmes section Vaud en 2018 et 2019 ainsi que le changement de stade du FC Lausanne-Sport lorsque la pandémie du coronavirus battait son plein. À cette période, il a également réalisé un reportage sur la situation des étudiant.e.s durant le confinement à travers des portraits accompagnés de témoignages.

Shervine Nafissi explore sa paternité
©Shervine Nafissi

Noora

Son projet le plus personnel, nous plongeant au coeur de son quotidien et de sa paternité, consiste en sa série « Noora ». Noora, du prénom de sa fille, signifie « lumière » en arabe. En photographie, la lumière est à l’origine de tout. Sans source lumineuse, aucune image ne peut être créée. Telle la lumière offrant au photographe la possibilité de saisir un sujet, Noora offre à son père une source de création et d’inspiration en constante évolution. Shervine saisit des fragments de vie, des instants fugaces appartenant à un père et son enfant. Il parvient ainsi à sauvegarder une trace d’un instant aussitôt passé et devient alors spectateur de son propre monde, qu’il conserve à jamais. Ce monde, Shervine a décidé d’en partager une partie avec nous, comme un éclat de douceur et d’amour.

Je regarde les gens que j’aime et je les fige à jamais.

Shervine Nafissi

Nous sommes partis à la rencontre de Shervine, afin de lui poser nos questions sur cette série, nous projetant au coeur d’instants privilégiés entre un père et sa fille, à travers le tendre regard d’un jeune papa.

Vous souvenez-vous comment la photographie s’est présentée à vous pour la toute première fois ? Qu’est-ce qui vous a poussé à en faire votre métier ?

J’ai effectué un doctorat en droit. Pendant cette période, j’avais un collègue passionné de photographie qui s’amusait à retoucher régulièrement ses photos au bureau. Au fil de nos discussions, il m’a transmis sa passion et un intérêt est né pour la photographie. Puis j’ai reçu de ma famille un boitier lors d’un anniversaire.

Shervine Nafissi explore sa paternité
©Shervine Nafissi

C’est seulement lors d’un break professionnel que je me suis réellement mis à pratiquer. C’était une révélation pour moi. La photographie est venue révéler des choses en moi que j’avais enfouies pendant longtemps : mon sens de l’esthétisme, ma curiosité et mon sens de l’observation. Elle m’a offert un espace de liberté et d’indépendance où je peux exprimer ma sensibilité. Pendant longtemps, je me suis demandé comment donner mon opinion, faire passer mes messages. J’avais timidement essayé la politique, puis l’écriture. Cela ne m’a pas plu. La photographie est devenue le moyen idoine.

Ce sont pour ces dernières raisons que je voulais en faire plus qu’un passe-temps. Je voulais que cette pratique, qui met en valeur ma personnalité et mes forces, soit un élément de mon quotidien.

Comment l’envie et l’idée de cette série photo vous sont-elles venues ?

C’est la combinaison de plusieurs éléments. Tout d’abord, cela faisait un moment que je voulais commencer une série photo mais aucun thème, sujet, ne venait naturellement. Je voulais entamer un travail au long cours.

Ensuite, lorsque ma fille est née, j’avais naturellement moins de temps pour faire de la photo. Il était très naturel pour moi de commencer à la prendre en photo, d’abord en tant que père un peu gaga, puis, au fil du temps, comme artiste.

Je me souviens parfaitement de la première photo qui m’a donné l’idée d’une série sur elle. Elle n’était pas là justement. J’étais seul dans l’appartement et une magnifique lumière de fin de journée tombait sur son landau, dans sa chambre. Ma fille s’appelle Noora, ce qui signifie « Lumière ». J’ai dès lors décidé de prendre en photo ses objets, tout ce qui rappelle sa présence, frappés par la lumière. Au fil de la série, elle apparaît, par petit bout.

Comment procédez-vous pour réaliser ces images ? Avez-vous toujours un appareil photo à portée de main ou bien choisissez-vous quel moment vous immortaliserez ?

À la maison, j’ai effectivement mon appareil photo à portée de main. Dès que je la vois dans une situation qui me semble intéressante d’un point de vue visuel, je cours le chercher. Je le prends également avec moi dans beaucoup de sorties à l’extérieur : pour aller au parc, lors de vacances ou de weekends en dehors de la maison. Il m’arrive de lui dire « ne bouge pas » lorsqu’elle fait quelque chose qui m’intéresse, mais je ne mets jamais en scène mes photos. De toute manière, elle est montée sur ressort et ne m’obéirait pas !

Shervine Nafissi explore sa paternité avec poésie et douceur
©Shervine Nafissi


Shervine Nafissi
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