En parcourant les rues, le photographe Damien Goret dévoile le potentiel graphique et artistique de l’architecture de nos villes. Ainsi, un mur coloré, une ombre bien placée et une silhouette imprévue deviennent sources d’inspiration inépuisables. Pour Damien, la Street Photography n’est pas une affaire de visages, mais surtout de lumière, d’ombre et de solitude urbaine.

Découvrez le parcours, les inspirations et le matériel de Damien Goret à travers notre interview exclusive.

photographie de Damien Goret
© Damien Goret

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours et ce qui vous a amené à la photographie ?

Il y a une vingtaine d’années, les aléas de la vie m’ont fait changer de profession, pour devenir journaliste. J’étais alors entouré de photographes avec qui je travaillais, et dont je trouvais les photos magnifiques. J’ai voulu comprendre comment ils arrivaient à produire de telles images. Je me suis formé de mon côté, avec mon boîtier dans la main, en regardant des vidéos, en lisant des articles, en apprenant la logique du triangle d’exposition, de la prise de vue manuelle 

Qu'est-ce que vous aimez dans la Street Photography ?

J’ai commencé à m’amuser avec de la photo de paysages mais je me suis rapidement ennuyé. Il me fallait quelque chose de plus quotidien : un endroit qui me permettrait de pratiquer tous les jours, tant photographier était devenu une obsession. Cet endroit, c’était la rue.

Jusque-là, j’avais une idée de la street photo très réductrice. Je pensais qu’elle se résumait à prendre des gens bien reconnaissables dans la rue, de manière candide ou non, un peu à la manière de Bruce Gilden. Moi, je voulais du graphisme. Je voulais que les personnes photographiées ne soient pas le sujet même de la photo. Je voulais voir les gens habiter leurs villes, je les voulais dans la solitude de leur environnement. 

J’ai “rencontré” l’univers de photographes sur Instagram ou Youtube qui m’ont montré que c’était possible, et dont j’ai adoré le style.

photographie de rue - street photography de Damien Goret
© Damien Goret

Quelles sont vos sources d'inspiration ?

Je pense avoir une culture photographique relativement pauvre, finalement. De nombreux photographes présents sur Instagram me font rêver, et ils n’ont pourtant pas la postérité de photographes connus.

Disons que parmi les photographes “connus”, je suis un fan d’Harry Gruyaerts, j’aime beaucoup Fan Ho, j’adore l’absence, l’ennui, la solitude de Grégory Crewdson, le minimalisme de Luigi Ghirri.

Mais certains réalisateurs de films, certains auteurs de bandes dessinées possèdent une science du cadrage et de la photo qui me touche et m’inspire aussi énormément. Certains peintres également, dont Edward Hopper.

Sur la grande majorité de vos photographies, nous pouvons observer des personnes au coeur de jeux d'ombre et de lumière les rendant méconnaissables. Pourquoi ce choix artistique ?

Parce que les gens ne sont pas le sujet de la photo. Le sujet de la photo, c’est la rue. La manière dont elle isole. Son graphisme, son architecture, ses couleurs, auxquelles je prête très attention, la façon dont les ombres et les lumières la transforment. La personne n’est qu’un point d’accroche du regard : c’est comme si elle donnait l’échelle dans la solitude, en quelque sorte.

Parlons un peu technique : comment réalisez-vous ces images ?

Toutes mes photos sont réalisées en RAW, uniquement en manuel et en mesure spot. Je veux maitriser entièrement mon exposition, préserver les hautes lumières, avoir des ombres et des noirs profonds. Je cherche toujours la plus grande profondeur de champ avec des réglages de base qui sont toujours sensiblement les mêmes : F8 et 1/500e de seconde minimum, pour figer le mouvement, et j’ajuste les ISO si besoin.

Est-ce uniquement des images prises sur le vif de manière intuitive ou repérez-vous les endroits en amont en attendant le bon moment ?

C’est un mélange des deux genres. En photo de rue, on dit souvent qu’on est soit chasseur, pour celui qui attend le bon moment, soit cueilleur, pour celui qui prend sur le vif. Je crois qu’un photographe de rue est toujours un peu des deux. 

photographie de rue - street photography de Damien Goret
© Damien Goret

Quel matériel utilisez-vous ?

Mon vrai compagnon de rue est un Ricoh GR, en l’occurrence un GRII. Ce petit boîtier ne me quitte quasiment jamais. Il est petit, discret, possède un piqué superlatif et dispose d’un système de mise au point assez unique. Il compte, selon moi, parmi les meilleurs boîtiers dédiés à la photo de rue dans le sens où il est toujours possible de l’avoir dans sa poche. Parce qu’en photo de rue, si je me souviens toujours parfaitement des images que j’ai prises, je me souviens tout autant des occasions que j’ai ratées, pour la simple raison que je n’avais pas d’appareil avec moi. C’est en ce sens, déjà, que le Ricoh est une merveille.

J’ai également investi dans un Sony A7 III, pour sa montée en ISO qui me sert beaucoup pour les prises de vue en basse lumière.

Avez-vous une étape de post-traitement dans votre processus créatif ?

Oui, j’utilise uniquement Lightroom. Selon moi, le post-traitement fait partie intégrante de la photo. Si la prise de vue est importante, le développement de l’image est une étape que je trouve excessivement grisante, où la photo brute se révèle encore un peu plus.

portrait en noir et blanc du photographe Damien Goret réalisé par Mathieu Le Galla
Le photographe Damien Goret © Mathieu Le Gall

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