Safety Cards – Les consignes de sécurité vues par Arseniy Neskhodimov
Photographe russe originaire de Samarkand, Arseniy Neskhodimov est aujourd’hui installé à Moscou. À travers des projets conceptuels à l’identité visuelle singulière, le photographe explore les sentiments de désillusion, d’anxiété et d’incertitude qui s’imposent à nous, à lui. Il est notamment lauréat du concours photo Wellcome avec sa série Prozac, illustrant sa propre expérience de la dépression.

C’est après avoir vu le film « L’insoutenable légèreté de l’être », dont Juliette Binoche campe le rôle principal d’une photojournaliste, qu’Arseniy décide de se lancer dans cette carrière. Attiré par le fait d’être au coeur de l’action et d’événements historiques, il voyait en ce métier quelque chose de romantique qui l’attirait. Il obtient son diplôme à l’Institut de la Culture de Kemerovo (Russie) où il a étudié le cinéma et la photographie. Il travaille ensuite un certain temps comme photojournaliste. Cependant, le fait de n’être que le témoin des événements qu’il photographie et de n’avoir aucune contrôle sur ceux-là, le lasse rapidement. Arseniy se lance alors dans ses projets personnels, parallèlement à une carrière de photographe commercial pour des magazines et des publicités.

Safety Cards
Safety Cards illustre l’anxiété et l’incertitude dont Arseniy a fait l’expérience ces dernières années. Il a commencé à élaborer cette série avant la pandémie, durant une période où il n’était plus sûr de rien. C’est dans un premier temps sa peur de l’avion qui lui inspire l’idée de reprendre les instructions de sécurité. Il s’inspire également des livres de vulgarisation scientifique de Yakov Perelman (1882-1942). Celui-ci est très populaire auprès des soviétiques. Il est frappé par ces illustrations d’expériences , à la fois effrayantes et incompréhensibles à ses yeux, qu’il compare aux films de David Lynch.

La réalisation
À huit clos dans leur appartement, Arseniy et sa femme (qui joue un rôle important dans la réalisation de ce projet) mettent en place Safety Cards. Avant de photographier, ils réalisent des croquis, une sorte de plan d’action, rassemblés sur des feuilles A4. Celles-ci sont par la suite accrochées sur les murs de leur cuisine. Ainsi, le projet est partout, constamment visible, et les objectifs ne sont jamais perdus de vue.

Ils restent chez eux durant six mois, sans jamais sortir, sauf pour jeter les ordures du ménage. Les images de la série sont ainsi toutes prises dans leur appartement de l’époque, leur cocon, leur studio. Ils se fixent pour objectif de prendre 2 à 3 photos par semaine. Héritage de son parcours, entre cinéma et photographie, Arseniy joue avec la lumière pour apporter un côté cinématographique à son histoire. Ses images paraissent alors tout droit sorties d’un film. Nous plongeons ainsi totalement dans l’histoire, dans la folie du personnage, ses angoisses et ses désillusions.
L’histoire d’une personne qui, assise chez elle, devient littéralement folle. Pour ne pas devenir fou, je faisais cette histoire pour rester sain d’esprit.
Arseniy Neskhodimov

Une photo particulière
Nous avons demandé à Arseniy s’il y avait une photo, parmi cette série, qui était particulière à ses yeux. Une question très difficile pour le photographe, qui voit en chacune d’elles quelque chose de spécial. Pour lui, c’est avant tout une histoire, dont chaque élément est nécessaire. Ce projet marque une période singulière pour le photographe et sa femme. Lors de la réalisation de Safety Cards, ils n’avaient plus de travail, ils restaient constamment dans leur appartement. Mais au-delà de leurs situations personnelles, le monde était à l’arrêt. La pandémie touchait tous les pays, tous les foyers, tous les esprits.
Il n’y avait pas une âme dans la rue. Tout était fermé. C’était comme la fin du monde. Mais je n’étais pas seul. Chacun avait sa propre fin du monde. Nous n’étions pas seuls.
Arseniy Neskhodimov

S’il devait tout de même choisir une photo, il y en a bien une plus étonnante que les autres. Il s’agit du coucher de soleil vu depuis sa fenêtre, se reflétant sur l’immeuble d’en face. Il a essayé de reproduire cette photo, en vain. Ce n’était jamais pareil.
J’ai été frappé par le fait que ce coucher de soleil ne s’est reflété qu’une seule fois et que je ne pourrai peut-être jamais le revoir. C’est probablement la seule photo non mise en scène de cette histoire que je ne peux pas refaire.
Arseniy Neskhodimov
Arseniy Neskhodimov : Site – Instagram
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Agenda Photo Février 2022
Que faire et voir au mois de février ? Rien que pour vous, voici notre agenda sur-mesure pour les amoureux de la photographie ! Expositions photo, concours, publications littéraires… Découvrez nos idées de sorties pour un moment de libre le week-end ou la semaine. Toutes les informations dont vous avez besoin afin de profiter de chacune des opportunités culturelles qui vous sont proposées proches de chez vous ce mois-ci.

Expositions photo
Et si nous commencions avec notre sélection d’expositions consacrées à la photographie ? Une exposition, c’est l’occasion de prendre quelques heures pour soi ou à partager et de plonger dans l’univers artistique d’un photographe. Vous y découvrez ainsi une vision du monde, un regard particulier. Entre découvertes, émotions, admiration et invitations au voyage, voici ce que vous pourrez voir en février.
Le Monde de Steve McCurry

Depuis le 9 décembre 2021 et ce jusqu’au 22 mai 2022, la rétrospective la plus complète dédiée au photographe américain Steve McCurry s’installe au Musée Maillol à Paris. L’exposition nous emmène aux côtés du reporter dans ses plus beaux voyages, de l’Afghanistan à l’Asie du Sud-Est, en passant par l’Afrique et l’Amérique latine. Découvrez ses clichés les plus célèbres, mais également les histoires derrière ceux-ci.
Angst de Soham Gupta

Rendez-vous à la Maison Doisneau pour découvrir l’œuvre photographique de Soham Gupta. Le photographe explore la condition humaine à travers les habitants de la Calcutta, en Inde. Il y aborde ainsi ouvertement la solitude, l’abandon, l’abus, la douleur… Soham Gupta met ainsi en lumière la vulnérabilité d’une part de la population, souvent invisible aux yeux du Monde. L’exposition est présente jusqu’au 30 avril 2022.
Gaston Paris, reporter. La photographie en spectacle

Du 19 janvier au 18 avril 2022, le Centre Pompidou accueille l’œuvre photographique de Gaston Paris. Reporter longtemps resté dans l’ombre, l’exposition vous amène à découvrir son univers, influencé par le surréalisme et les années folles. Il a notamment photographié la libération de Paris et visité l’Allemagne après la seconde guerre mondiale pour enquêter sur la destruction du pays. Mais il a également réalisé des clichés d’artistes tels que Brigitte Bardot, Édith Piaf ou encore Henri Salvador.
To the Water de Soo Burnell

L’hôtel Molitor reçoit les photographies des plus belles piscines d’Europe réalisées par la photographe Soo Burnell. Jusqu’au 20 février, venez découvrir l’œuvre de la photographe écossaise, qui n’a pas choisi le Molitor et sa mythique piscine par hasard. Soo Burnell s’inspire en effet des architectures singulières de lieux tels que celui-ci et part, depuis 2018, à la recherche de nouvelles piscines à immortaliser, à travers toute l’Europe.
Raymond Depardon et Kamel Daoud. Son oeil dans ma main. Algérie 1961-2019

Le 8 février prochain, L’institut du Monde Arabe accueille un témoignage unique sur l’Algérie de 1961 puis de 2019, à travers les regards d’un photographe reporter français et d’un journaliste et écrivain algérien. À l’approche du 60ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, vous découvrirez 80 photographies de Raymond Depardon et cinq textes inédits de Kamel Daoud.
Patrick Zachmann. Voyages de mémoire

Patrick Zachmann mène une longue « enquête » sur les juifs de France, à la recherche de sa propre identité. Le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme accueille plus de 300 clichés du photographe, pris de 1970 à 2015 ainsi qu’un film, La Mémoire de mon père. Patrick Zachmann va saisir les différentes facettes de la judaïcité française durant plusieurs décennies. Il va également réaliser de nombreux reportages poignants hors de France.
Pamela Tulizo. Face to Face

Lauréate en 2020 du Prix Dior de la Photographie et des Arts Visuels pour Jeunes Talents, Pamela Tulizo expose à la MEP jusqu’au 13 mars 2022. Avec Face to face, elle questionne le regard posé sur les femmes de son pays, la République démocratique du Congo.
The Day May Break de Nick Brandt

Polka Galerie nous dévoile pour la première fois en France la nouvelle série de Nick Brandt. The Day May Break est présente jusqu’au 12 mars 2022. Le photographe britannique y explore l’impact des désastres climatiques et écologiques sur les espèces animales et les êtres humains du monde entier.
Paparazzi de A à Z de Daniel Angeli

Jusqu’au 27 février 2022, le Toit de la Grande Arche de la Défense expose les grands clichés, volés ou officiels, du photographe des stars, Daniel Angeli. Pour la première fois, plus de 200 clichés du photographe seront exposés, dont de nombreux inédits.
Les Portraits de Judith Joy Ross

Le Bal exposera à partir du 17 février 2022 l’œuvre de Judith Joy Ross. La photographe américaine capture essentiellement des portraits d’inconnus de tous horizons depuis les années 80. Au hasard des rues, Judith Joy Ross immortalise autant l’innocence des jeux enfantins que l’engagement politique ou le deuil.
Chefs-d’oeuvre photographiques du MoMA

Le Jeu de Paume ouvre ses portes, jusqu’au 13 février 2022, à plus de 230 images appartenant à la collection moderne du MoMA. Pour la première fois hors de New-York, découvrez les œuvres d’une centaine de photographes ayant participé à l’histoire de l’invention de la modernité en photographie.
Fake World par Jean-Marc Yersin et Sébastien Pageot

À Aix-en-Provence, la galerie Parallax accueille sa première exposition de l’année, du 5 février au 2 avril 2022. Celle-ci vous plongera dans des mondes parallèles imaginés par les deux photographes Jean-Marc Yersin et Sébastien Pageot.
MIRKINE par Mirkine : photographes de cinéma

La ville de Nice et son Musée Masséna célèbrent les belles années du cinéma au travers de l’exposition Mirkine par Mirkine : photographes de cinéma du 18 décembre 2021 au 15 mai 2022. Découvrez plus de 250 tirages, des œuvres originales comme des archives inédites, dans une fresque esthétique et historique immortalisant un demi-siècle du cinéma français.
Hinders de Idan Wizen

Idan Wizen sera à Strasbourg du 04 au 27 février 2022 pour présenter sa nouvelle exposition Hinders à la Chouette Galerie d’Art. L’artiste photographe franco-israélien aborde dans ses photographies différentes problématiques sociétales et décrit, de manière subtile et onirique, une ode au libre arbitre.
Jean Dieuzaide : 60 ans de photographie

À Toulouse, retrouvez l’exposition rétrospective consacrée au photographe français Jean Dieuzaide à l’occasion du centenaire de sa naissance. Installées au Couvent des Jacobins, vous y découvrirez plus de 200 œuvres et archives, parfois inédites.
Concours photo
Vous aimez la photographie et vous souhaitez confronter votre travail à celui d’autres photographes ? Le mois de février marque l’ouverture du VIF à l’occasion du Festival le Grand Concours ! Cette année, nous découvrirons vos plus beaux clichés sur le thème « La joie est en tout, il faut savoir l’extraire« . Alors à vos appareils ! Vous avez jusqu’au 28 février 2022 avant minuit pour soumettre une série de 10 photos. Ensuite, le jury d’exception, composé de professionnels et d’amateurs à l’œil aiguisé, départagera les lauréats de ce grand concours.

Librairie
La photographie, on la retrouve aussi et surtout dans les livres ! En février, si vous aviez un livre à acheter, ce serait lequel ? Nous, on a déjà nos petites idées…
- Nous vous avons déjà parlé de Contes du Nord, le tout premier livre photo du street photographe Romain Ruiz. Il y conte le quotidien des habitants du Nord-Pas-de-Calais, toujours à la recherche de l’insolite et l’exubérant dans les situations qu’il rencontre.
- À l’occasion de l’exposition sur son œuvre, redécouvrez pleinement le photographe Gaston Paris à travers l’ouvrage du même nom. L’ouvrage consiste en un témoignage exceptionnel de l’évolution de la société de l’entre-deux-guerres.
Avec tout ça, le mois de février ne manquera pas de nous apporter surprises et émotions.
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La photo de rue en noir et blanc de Jeza
De son vrai nom Jeremy Piloquet, Jeza est un photographe âgé de 42 ans et originaire de Basse-Goulaine, aux environs de Nantes. Autrefois dans la restauration, il change de vie pour se consacrer pleinement à sa passion en 2019. Ce tournant s’effectue à la suite du partage d’un de ses clichés par France Bleu Périgord. Le photographe prend alors conscience du potentiel de ses images et se lance dans l’aventure. Aujourd’hui, son travail brille à l’international. Il a en effet été publié dans un magazine d’art renommé au Japon.
Jeza entre dans le monde de la street photography pour y imposer son propre univers. Celui du noir et blanc et des jeux de reflets. En jouant à sa manière avec ces étendues d’eau, il nous offre sa vision, une nouvelle perspective, pour alors voir nos villes d’un angle différent. De temps à autre, il aime retourner ses clichés, apportant ainsi une réflexion en plus et cet effet miroir qui rend l’image si spéciale.
Un univers personnel et monochrome
Lorsque nous lui demandons les raisons de cette photographie presque exclusivement en noir et blanc, Jeza nous livre sa perception.
Ma volonté est uniquement retransmise par des photographies en noir et blanc car c’est ce qui rend le message plus fort, plus poétique, plus dramatique… Par ce biais, on revient à l’essentiel. On fait ressentir des émotions brutes. La couleur étant absente, j’utilise d’autres techniques pour faire passer mon message comme les lignes, les textures, les réflexions ou les perspectives. Cela apporte davantage d’authenticité aux photos. Notre vision étant en couleurs, photographier en noir et blanc revient à interpréter la réalité et transposer l’image dans un univers presque irréel. Le noir et blanc a la capacité de déclencher une émotion ou une réflexion plus intense.
– Jeza
Quant aux lieux de ses photos, comment les choisir ? Réfléchir minutieusement ou se laisser guider par son instinct et s’ouvrir à l’imprévu ?
Quand je pars pour faire de la photo, je sais où je vais mais jamais où cela me mènera. J’aime l’inattendu, je multiplie les clichés parce que j’aime avant tout me faire plaisir et surtout me laisser surprendre. Les villes dégagent à la fois de l’énergie et de la magie. Les habitants, les bâtiments et les rues sont autant de sources d’inspiration. J’essaie d’avoir un oeil nouveau sur les sites les plus touristiques pour obtenir un point de vue qui plongera les spectateurs dans l’univers de ma photo. Cependant, ma satisfaction réside dans la capture de ruelles conventionnelles pour en tirer une ambiance singulière. Ce sont les détails qui font l’identité d’une ville. Souvent invisibles au premier coup d’oeil, ceux-ci peuvent pourtant donner lieu à de magnifiques photos. Faire de l’inattendu avec de l’ordinaire.
– Jeza
Une photo coup de coeur
Sans pouvoir nous l’expliquer, le photographe nous dévoile l’image, appartenant à cette série photographique sur les réflexions, qui lui tient le plus à coeur. Pour lui, la photographie qu’il a nommé I’ll be different dégage tout simplement quelque chose de fort et d’inexplicable.


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Les Contes du Nord par Romain Ruiz
Street photographe installé à Paris, Romain Ruiz met à l’honneur sa région de naissance, le Nord-Pas-De-Calais, dans son tout premier livre photo, Contes du Nord. Romain crée son univers photographique tout en étant animé par le travail de grands photographes documentaires. Parmi ces grands noms, Martin Parr ou encore Tom Wood l’inspirent dans son oeuvre.
Constamment à la recherche de l’insolite et de l’exubérant dans chaque situation, Romain fait apparaître le fantaisiste et l’enfant qui se cache en chacun de nous.

Dans ce récit visuel, Romain Ruiz nous dévoile son monde, entre réalité du quotidien et fantaisie de l’esprit. Appareil en main, le photographe s’aventure autant dans les grandes villes, telles que Lille, que dans les petits villages du Nord-Pas-de-Calais.

Partant à la recherche de ces instants fugaces, il met en scène des hommes, des femmes et des enfants de tout âges et horizons. Nous les découvrons dans leur quotidien, animé par les traditions de leur région.

La photographie urbaine de Romain met en scène les contes personnels de chacun de ses sujets. Ainsi, nous oscillons sans cesse entre réel et fantastique. Notre regard étant attiré à la fois par les situations fantasques que par les enseignes publicitaires qu’il laisse apparaître.

Découvrez davantage Romain Ruiz d’après notre précédente interview et retrouvez-le dans l’un de nos cours photographie à Paris.
Contes du Nord est dès à présent disponible à la commande aux éditions Filtreditions et bientôt disponible en libraire.



Romain Ruiz : Site – Instagram
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