Le Calendrier de l'Avent Graine de Photographe
Vous sentez cette bonne odeur de cannelle et de sapin ? Les fêtes approchent ! Pour ce mois de décembre 2023, Graine de Photographe a revêtu son costume de Père Noël avec un calendrier de l’Avent exceptionnel ! De nombreux cadeaux n’attendent que vous !

Déjà révélé sur notre page Instagram, le premier lot est un tirage Fine Art sur papier Hahnemühle 350 gr Museum Etching au choix parmi quatre portraits du talentueux et renommé photographe Arnault Joubin. Grâce à la généreuse dotation d’Arnault Joubin, tentez de remporter un portrait de César, Alain Bashung, Woody Allen ou Roschdy Zem d’une valeur de 3500€, signé, numéroté et remis en propre par le photographe à Paris ! N’attendez plus et participez au tirage au sort en suivant les indications sur le post Instagram !
À lot exceptionnel, règle exceptionnelle ! Pour participer, il faut avoir effectué une commande chez Graine de Photographe entre le 1er et le 31 décembre 2023. N’oubliez pas de préciser au moment de votre commande dans l’espace destiné au service client votre identifiant Instagram afin de vérifier que tous les critères de sélection soient respectés.
Des lots à gagner tout le mois de décembre !
Restez aux aguets, car tout le mois de décembre, Graine de Photographe vous présentera ses nombreux lots ! Nous remercions nos partenaires, grâce à qui la magie de Noël plane sur le monde de la photo. Un grand merci à Arnault Joubin, la MEP, MMF Pro, NYA-EVO, Ilford, Eyrolles, 3 legged things, l’Abeille Autonome, Luminar et Westcott !
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Urban Sprawl Emptiness, la poésie et le chaos de l'Ouest américain par Emmanuel Monzon
Dans l’Ouest américain, perdu entre l’autoroute et le désert, le photographe Emmanuel Monzon exerce son art photographique à travers une série intitulée Urban Sprawl, Emptiness. Ce franco-américain diplômé de l’Académie des Beaux-Arts, basé à Seattle, explore l’urbanisme et l’Humain aux frontières du désert.
Dans les alentours de la mer de Salton, entre Bombay Beach et la Montagne du Salut, Emmanuel Monzon photographie des paysages qui le touchent, lui parlent et résonnent avec son travail artistique.

Urban Sprawl, Emptiness ; arriver à destination
La série Urban Sprawl, Emptiness (que l’on peut traduire par « Étalement urbain, vacuité ») a souffert des complications dues au Covid et au confinement, ce qui a amené Emmanuel Monzon à la sous-titrer « Je ne veux pas aller là où je vais, je veux juste vivre là où je suis » .
Les photos témoignent de l’état d’un pays qui se trouve entre son passé glorieux et son présent chaotique et incertain. Les paysages figés de régions à l’abandon sont saisis et offrent en retour des visions poétiques d’une population nouvelle bien décidée à survivre.
J’ai récemment remarqué qu’il y avait une résonance entre cette série et le film Nomadland, qui est sorti récemment : où des personnages, qui sont pour la plupart marginalisés, et pour certains par choix, ont décidé de partir en dehors du monde. Un monde que l’on pourrait résumer par « Vous êtes arrivés et en même temps vous n’êtes jamais partis ».
— Emmanuel Monzon

L'œil d'un peintre
Artiste plastique de formation, Emmanuel Monzon applique à sa photographie des codes propres à la peinture. Le sujet de ses photos, qui parlent et questionnent la transition du milieu urbain au milieu naturel, rejoint une méthodologie artistique unissant la peinture à la photographie.
Dans Urban Sprawl, Emptiness, le cadrage de ses photos est volontairement carré pour concentrer l’intérêt du spectateur sur le sujet, le mettant ainsi bien en évidence dans les compositions. La palette de couleur n’est jamais éclatante mais jamais terne non plus. Sous une lumière diffuse, elles s’harmonisent en des tons qui complimentent les clichés et aident à souligner un vide déjà explicité par le manque de sujets humains. Dans ces paysages naturels, ce ne sont que les éléments d’architecture urbaine qui se dessinent.
Le vide et la beauté
« Un homme est en effet une ville, et pour le poète il n’y a d’idées que dans les choses. »
— William Carlos Williams, Paterson
À travers Urban Sprawl Emptiness, Emmanuel Monzon explore le vide et trouve de la beauté dans celui-ci. Ces représentations désolées de paysages à la fois familiers et étrangers ne sont que des photographies mais laissent à entendre un silence assourdissant. Sans jugement ni dénonciation, le photographe extrait du mondain une forme esthétique ; exposant une réelle beauté, cachée là où la plupart d’entre nous n’accorderait qu’un regard furtif.
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Second Nature, la relation de l'Homme et la Nature par Kaya & Blank
Le duo de photographe turc-allemand formé par Işık Kaya et Thomas George Blank, basé aux États-Unis, explore la manière dont l’humanité occupe le monde à travers leur travail photographique et vidéo. Bien que profondément ancrée dans la photographie documentaire, leur approche résulte souvent en une représentation visuelle hyper réaliste du monde qui transcende le domaine de la représentation.
Dans un livre récent intitulé Second Nature, Kaya & Blank se penchent sur les installations d’antennes téléphoniques camouflées en arbres qui se cachent dans le paysage urbain. Dans la lignée de leur travail sur l’architecture, ils soulignent ainsi l’apparence à la fois familière et étrange de ce mobilier urbain sur lequel notre regard ne s’attarde souvent pas assez.

Second Nature, un projet documentaire
Après avoir emménagé en Californie il y a quelques années, Işık et Thomas découvrent pour la première fois un arbre factice affublé d’une antenne téléphonique. La vue de ces étranges structures a poussé le duo à utiliser le médium photographique pour observer et documenter ce phénomène d’antennes déguisées. Ces deux artistes s’intéressant déjà à la relation de l’Homme et de son milieu, a trouvé en ces « arbres » incongrus un nouveau sujet d’exploration de l’humain et de la nature.
Désireux de rendre compte de ce phénomène, Kaya & Blank photographient ces antennes depuis le bord des routes, avant de se rendre compte que la plupart sont en fait accessibles au public et qu’il existe même des cartes de leurs emplacements sur certains sites internet. Une vraie chasse commence alors pour eux.
« Sur les cartes, ils n’indiquent pas quels arbres sont des antennes. Certaines d’entre elles ont des dizaines de milliers de marqueurs. Alors quand le premier confinement a eu lieu en Californie en 2020, Thomas a passé des journées entières à utiliser Google Street View pour repérer les lieux. »
Après quelques semaines de recherche, ils retiennent quelques mille endroits précis où aller photographier en Californie du Sud. En 2022, toutes les antennes entre le Nouveau-Mexique et Bakersville sont passées sous l’objectif d’Işık et Thomas. Il en résulte alors Second Nature, une série d’une centaine de clichés condensés en un livre photographique.

Politique d'un environnement bâti
« Nous souhaitons que notre travail amène les gens à s’interroger sur le monde dans lequel nous vivons. »
Il y a quelques années, pour la première fois de l’Histoire, l’humanité a dépassé le seuil de 50% de population vivant dans les villes. Işık et Thomas rendent compte de ce fait et font un travail de réflexion autour ce cela. Nous vivons pour la majorité dans un espace créé pour les humains.
« Malheureusement, il est très rare qu’ils soient créés pour les humains. Ils sont plutôt créés pour maximiser les flux de marchandises et de main-d’œuvre. Les relations que nous développons avec ces espaces sont souvent ambiguës. Nous aimons le confort des voitures personnelles et la vitesse des autoroutes, mais la dépendance aux combustibles fossiles provoque le réchauffement de notre planète. Nous aimons la connexion rapide, sans fil et omniprésente aux réseaux de télécommunication par l’intermédiaire des tours cellulaires, mais, grâce à Edward Snowden, nous savons que les gouvernements s’en servent pour collecter des données et nous surveiller. Que faire alors ? C’est ce genre de réflexion que nous aimerions évoquer. »
Ainsi Kaya & Blank saisissent la curiosité des arbres-antennes. Avec des photos souvent réalisées à la tombée de la nuit, ils renforcent le côté artificiel et étrange du mobilier urbain moderne. Cette approche esthétique amène presque le spectateur à se demander si les images n’ont pas été générées artificiellement, soulignant définitivement les relations ambigües de l’Homme à la technologie qui envahit l’environnement.

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Nos idées de cadeaux photo pour Noël 2023
Vous la sentez cette bonne odeur de cannelle ? Les marchés de Noël apparaissent, les rues s’illuminent et un temps de liesse et de retrouvailles familiales s’installe. Mais cette belle période n’est pourtant pas forcément de tout repos car il vous faut trouver des cadeaux à vos proches. Et on sait à quel point cela peut être un véritable casse tête ! Alors pour tous vos proches passionnés de photographie, Graine de Photographe vous donne un petit coup de pouce avec des idées cadeaux diverses et variées, de quoi habiller le pied de votre sapin et remplir vos chaussettes pour Noël 2023 !
Instax Pal de Fujifilm

Fujifilm a sorti son nouvel appareil photo de poche, l’Instax Pal ! Ce modèle (très) réduit tient dans toutes les poches et se connecte à votre smartphone pour stocker les images et l’utiliser comme déclencheur. Avec son grand angle, tous vos amis rentreront dans votre cadre, pour des souvenirs à partager !
Découvrez l’Instax Pal sur le site de Fujifilm.
Une carte cadeau pour développer ses pellicules

Si certains de vos proches utilisent toujours leur appareil photo argentique, les pellicules peuvent rapidement s’amonceler. Avec la carte cadeau Négatif +, donnez leur l’occasion de développer leurs films ! Un cadeau particulièrement encourageant pour ceux qui débutent à l’argentique.
Les cartes cadeaux Négatif +, à partir de 20€
Une masterclass avec un photographe professionnel

En début d’année 2024, Graine de Photographe propose deux Masterclass animée par des photographes professionnels. Offrez une formation à la photographie de portrait aux côtés d’Arnault Joubin en février : de la théorie à la prise de vue, deux jours de cours 100% portrait pour se former. En mars, c’est avec Léo Fontanel que se tiendra la masterclass d’architecture Fine Art. Deux jours pour apprendre à sublimer vos photos d’architecture.
Retrouvez nos masterclass sur le site de Graine de Photographe
Un abonnement à un magazine photo

Un magazine photo est une idée de cadeau idéal pour tout passionné de photographie. Cela permet d’être au courant des modes photos du moment, des artistes en vogue, de trouver de l’inspiration et d’être au courant des nouvelles sorties ! Une idée sûre qui permet de se plonger dans les tendances photos !
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Un niveau à bulle pour appareil photo

Voilà un cadeau mini prix et très pratique. Ce niveau à bulle s’adapte au port du flash des appareil photos et qui saura aider tout photographe dans ses compositions ! Un gadget qui assurera des photos toujours droites.
Découvrez le niveau à bulles pour appareil photo
Une formation longue chez Graine de Photographe
Donnez un coup de pouce à vos connaissances qui veulent se lancer dans la photo avec notre Graine de Photo Academy, une formation à la photographie sur six mois pour débutants ! Un programme complet pour que la photo n’ait plus de secrets pour eux, avec à la clé un vernissage dans notre galerie ! Et pour les plus avancés, notre Graine de Photo Academy avancé viendra perfectionner leurs connaissances et leur offrira la possibilité de créer leur propre livre photo avec notre partenaire Saal Digital !
Pas le temps de s’engager sur six mois ? Nous avons également des formations de deux à trois jours pour débutants, adultes et ados, adaptés à tous les emplois du temps.
Un trépied
Un trépied est un équipement indispensable pour un photographe. De la photo de paysage au portrait, celui-ci stabilise l’appareil et permet d’éviter d’avoir des images floues. Le choix d’un trépied peut s’avérer compliqué car il faut en trouver un robuste, léger et compact qui ne vous lâchera pas au premier imprévu. Graine de Photographe est là pour vous proposer le monopode 3 Legged Thing, un trépied ultra compact et solide et qui trouvera sa place dans tous les sacs de photographes.
Le monopode 3 Legged Thing chez MMF Pro
Holga 120

Le Holga 120 est un appareil photo argentique en plastique très simple d’utilisation en format 120 qui saura ravir tous ceux qui souhaitent se lancer dans l’argentique. Avec un prix à moins de 50€, c’est un bon moyen de faire découvrir la photographie vintage à vos amis ou à votre famille.
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Un chèque cadeau Graine de Photographe

Envie d’offrir un cours photo mais vous n’êtes pas sûr des disponibilités et du niveau de vos proches dès Noël 2023 ? Optez pour le chèque cadeau Graine de Photographe ! Choisissez votre valeur, bénéficiez de remise sur les packs et laissez le choix de la formation à vos proches. Le bon reste valide un an, pour pouvoir s’organiser en toute sérénité !
Un sac à dos
On ne vous apprends rien en disant qu’un sac à dos, c’est pratique. Ça l’est d’autant plus pour un photographe qui commence à avoir pas mal de matériel à transporter ! Pour être prêt à shooter à tout moment, un bon sac permettra le transport du matériel divers tout en allégeant le dos, parfait pour des longues sorties photos en nature ou en ville. Le sac NYA-EVO Fjord est alors tout indiqué : léger, résistant, il permet de ranger tout son matériel sans se soucier des chocs ou de la pluie et des sangles de support lui permettent de ne pas peser sur le dos de son porteur
Le sac à dos NYA-EVO Fjord 36 Rouge Canyon chez MMF Pro
Un disque dur externe

Toujours indispensable, le disque dur externe facilite le stockage et le catalogage des centaines de photos qu’un photographe peut prendre. De plus, un disque dur permettra d’éviter les pertes éventuelles en cas de problèmes d’ordinateur ! Si votre ami photographe n’en possède pas, offrez lui ce cadeau véritablement incontournable pour Noël 2023.
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Un abonnement à un logiciel de retouche photo
De nos jours, la retouche est un élément indispensable de la pratique photographique. Plus moyen d’y couper ! Si vos proches ou vos amis commencent à être sérieux dans leur pratique photographique, songez à Photoshop et/ou Lightroom ou encore Luminar Neo de Skylum pour les aider à aller plus loin dès Noël 2023 !
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Un cours d'initiation à Lightroom ou Photoshop

Un conseil cadeau en lien avec le précédent ! Nos cours d’initiation à Lightroom et Photoshop permettent de faciliter l’utilisation de ces logiciels aux interfaces (pas si) complexes. Une idée cadeau idéale pour un utilisateur qui a du mal à utiliser les outils de ces logiciels ou pour quelqu’un qui découvre la retouche.
Nos cours de retouche sur le site de Graine de Photographe
Canon Selphy CP1500

Cette petite imprimante Canon permet de réaliser des tirages de qualité professionnelle où que vous soyez. Portable et polyvalente, vous pourrez imprimez depuis votre smartphone, ordinateur ou même directement depuis votre carte SD. Les tirages photos sont revêtues d’une protection spéciale pour des impressions résistantes et durables.
Sténopé Mini-Labo par Sténoflex

Un cadeau pour remonter aux origines de la photographie ! Ce mini labo contient tout ce qu’il faut pour prendre ses propres photos, les développer et les tirer soi-même en chambre noire. Une idée ludique et originale à mettre sous le sapin d’un amateur de photographie !
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Porte clé pellicule photo

Une idée cadeau pour les nostalgiques souhaitant partager des souvenirs pour Noël 2023 ! Ce porte clé est 100% personnalisé peut contenir jusqu’à 20 photos et se déroule et s’enroule dans la pellicule pour un accès rapides à vos meilleurs souvenirs.
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Un abonnement pour une institution culturelle
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Les Nightwalkers de Sabine Agostini
Sabine Agostini commence la photographie un peu par accident, de manière naturelle, sans se poser de questions. Guidée et inspirée par d’autres passions parallèles, elle fait de la photographie sa profession en 2019.
Sabine ancre sa photographie dans la nuit et les atmosphères anxiogènes que celle-ci peut procurer. Puisant son inspiration dans le cinéma noir des années 50 et la pop culture des années 80, elle soulève les craintes et les troubles d’une balade solitaire la nuit. D’une théâtralité certaine, ses photos racontent une histoire avec une utilisation proéminente de la lumière comme élément narratif, à mi-chemin entre les films de John Carpenter et le cinéma de David Lynch.
Avec sa série Nightwalkers, elle met en scène des silhouettes perçues dans l’obscurité, plaçant le spectateur dans des tableaux urbains où survient l’inquiétante étrangeté.
« La question n’est pas de savoir ce qui s’est passé, mais ce qui va se passer, charge à chacun d’interpréter. » – Sabine Agostini

Un besoin de photographier
Quand elle photographie, Sabine ressent qu’elle capture un moment qui fait partie d’un vaste tout. Très inspirée par le théâtre et le cinéma, son œuvre est comme un arrêt sur image, une capture d’un moment avec une histoire sous-jacente perceptible. Le médium photographique est pour l’artiste un élément narratif certain.
« Au cours de mes errances nocturnes je m’attarde essentiellement sur les espaces désolés, vidés de toute présence humaine, privés de toute temporalité. Ce dépouillement renforce à mon sens la dramaturgie derrière l’image. L’absence de l’homme, le silence qui se dégage d’une photo où rien ne se passe (pour l’instant!) présente un aspect encore plus mystérieux et inquiétant. » – Sabine Agostini
Nightwalkers, une histoire de silhouettes
La démarche de l’artiste pour sa série Nightwalkers est toutefois légèrement différente. Dans ces photos de rue, les personnages centraux sont des silhouettes occupant le cadre. Ces silhouettes, fugaces, élusives, font survenir comme un malaise existentiel. Elles ne sont que de passage, telles les ombres qu’elles sont. Elles demeurent fantômes.
« Tout est mystère et tout est question. »- Sabine Agostini
« L’idée est de rester dans la suggestion, de conserver une sensation mélancolique d’étrangeté et de jouer avec les codes du cinéma noir, du polar, par le jeu d’éclairage, du cadrage et de la colorimétrie. » – Sabine Agostini
Les sources d’inspirations de Sabine Agostini sont ressenties à travers cette série. Que ce soit le cinéma d’Alfred Hitchcock ou de David Lynch, les toiles d’Edward Hopper, la photographie de Todd Hido; ou encore en littérature avec les polars nordiques ou l’esthétique rétro futuriste de Blade Runner, ces influences se réunissent autour de dénominateurs communs : la lumière et l’atmosphère crépusculaire.

L'importance de la post-production
Pour obtenir le rendu le plus cinématographique possible, Sabine estime que la retouche est une partie essentielle de son travail. Si la photographie en elle-même permet de capturer ces états de solitude, de désespoir et de mal de vivre urbain, la retouche, elle, permet de les renforcer.
« Dans mon travail, la source lumineuse — même infime, joue toujours le premier rôle, qu’il y ait ou non une présence humaine dans le cadre. Elle rythme l’image et se dirige quasiment systématiquement vers celui qui regarde; faisant peut-être de la peinture clair-obscur ma première source d’inspiration. » – Sabine Agostini
La lumière accompagne donc les silhouettes, non seulement révélatrice mais également personnage des histoires de l’artiste. Les couleurs de la lumière suscitent et renforcent l’émotion des scènes selon leur chaleur ou leur intensité. Crainte, mélancolie, mal-être et ambiances sulfureuses ne sont pas photographiés par Sabine mais bel et bien peints par l’artiste.
« Je souhaite d’une certaine manière que le spectateur s’interroge sans cesse sur le dénouement et que la réponse puisse rester ouverte » – Sabine Agostini

Nightwalkers, la photographie de l'inquiétante étrangeté
Des clichés de Sabine peut ressurgir un sentiment d’angoisse, sans pour autant que ce soit une angoisse fondée. Avec Nightwalkers, la familiarité des décors et des silhouettes sans pour autant qu’ils soient définis et distinguables font jouer ce sentiment d’inquiétante étrangeté. Le spectateur est face à son intime, à des lieux qu’il reconnaît sans pouvoir les placer. Cette narration sans dénouement précis que nous fait Sabine Agostini perd le spectateur et nourrit des interrogations certaines face à cette familiarité inquiétante.
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L'architecture Fine Art selon Léo Fontanel
Léo Fontanel, photographe indépendant au sein de Graine de Photographe, anime depuis 2024 la masterclass photo d’architecture Fine Art. À l’occasion de cette formation exceptionnelle, Léo se confie sur son parcours, ses projets, nous présente sa vision de l’art photographique et sa volonté de transmettre sa passion au plus grand nombre.
La masterclass d’architecture Fine Art est une formation de deux jours animée par Léo Fontanel. Au cœur de cette expérience, apprenez comment l’art peut transcender l’architecture aux côtés d’un professionnel. Cette approche artistique ne se limite pas à la simple capture de bâtiments ; elle les métamorphose en sujets de contemplation et d’émerveillement.

Découvrez Léo Fontanel, un artiste passionné et passionnant, qui nous partage son enthousiasme et son expertise lors de cette interview.
Peux-tu présenter ton parcours et ce qui t'a amené à la photo ?
Je m’appelle Léo, photographe de 33 ans basé à Rennes, spécialisé dans la photographie d’architecture et de paysages en noir et blanc. J’ai commencé dans la photo il y a 11 ans, une passion devenue profession. Je suis auteur et je mène aussi une carrière en photographie commerciale parallèlement. Ma fascination pour les voyages et la nature m’a d’abord conduit vers la photographie de paysages traditionnelle. Au fil du temps, j’ai été attiré par les villes et l’architecture, cherchant à me démarquer par mon style caractéristique : le noir et blanc, la pose longue et la post-production pour jouer avec la lumière. Mon but n’est pas de capturer la réalité, mais de créer un nouveau monde pour mes sujets, les transportant en dehors de leur contexte. Cela me permet de traduire visuellement ma perception, mes pensées et mes émotions.
Qu'est-ce que tu aimes particulièrement avec l'art photographique ?
C’est avant tout la possibilité d’exprimer mes émotions justement. Étant plutôt maladroit en écriture, dessin, peinture ou musique, la photographie devient mon langage pour partager ce qui se passe dans mon esprit. Certes, ma vision du monde peut paraître sombre, froide et dystopique, mais c’est vraiment l’émotion que j’ai envie de retranscrire par mes images.
Quelles sont tes inspirations en photographie ?
Bien que mon style soit affirmé, je ne prétends en aucun cas avoir inventé ce courant visuel. Je dois beaucoup à deux photographes qui ont laissé une marque indélébile dans ma démarche créative. Il s’agit de Julia Anna Gospodarou et Joel Tjinjelaar. Je recommande vivement la lecture de leur livre « From Basic to Fine Art« , qui a été le point de départ de mon processus artistique.

D’autres photographes qui m’inspirent beaucoup incluent Michael Kenna, Cyrus Cornut, Lucien Hervé, Teo Kefalopoulos, Jay Vulture, sans oublier d’autres sources d’inspiration peut-être encore plus importantes telles que le cinéma et la littérature de science-fiction.
As-tu un projet personnel dont tu aimerais nous faire part ?
Pour l’instant, je ne ressens pas le besoin d’explorer d’autres domaines que l’architecture et les paysages. Même si j’ai déjà acquis une petite reconnaissance, je sens qu’il me reste encore beaucoup à explorer avant de passer à autre chose. J’ai en tête des destinations comme Berlin, Munich, Londres et Dublin, qui seront très probablement mes prochains projets.
Quel est le matériel que tu juges indispensable à ta pratique ?
Dans la photographie d’architecture, il y a certaines règles à respecter en termes de compositions et il est assez difficile de passer outre l’objectif à décentrement. Pour ceux qui ne seraient pas familiers, il s’agit d’un objectif conçu pour empêcher les lignes convergentes dans les images. En dehors de cela, quelques éléments sont indispensables à ma pratique : un trépied de qualité, des filtres ND pour les poses longues, et bien sûr, un bon boîtier.
Quels sont les lieux où tu préfères t'adonner à la photo ?
J’ai un faible pour les architectures de Santiago Calatrava, et je m’efforce de visiter les endroits où ses créations se dressent. Ces bâtiments aux formes splendides, souvent d’un blanc éclatant, contrastent magnifiquement avec un ciel sombre, comme je les affectionne. Cela m’a conduit en Argentine et en Espagne, entre autres.
Comment as-tu entendu parler de Graine de Photographe ? Et qu'est-ce qui te motive à enseigner chez Graine ?
J’ai été mis en contact avec Graine de Photographe l’année dernière lorsque j’encadrais des stages via une autre agence. Au cours de ces stages, plusieurs participants m’ont vivement recommandé Graine de Photographe, louant la qualité de leur enseignement et l’ambiance conviviale qui y règne. Cela m’a incité à les contacter, et je suis enthousiaste à l’idée de partager mon savoir-faire et ma passion au sein de cette belle communauté !
Quelles sont les qualités nécessaires à un photographe à tes yeux ?
À mes yeux, l’humilité est une qualité importante pour un artiste. Elle est un rappel constant de la distance qui nous sépare des grands maîtres. Elle nous permet d’admettre que nous avons des lacunes, que nous ne savons pas tout, et que chaque nouvelle photographie est une opportunité d’apprendre quelque chose de nouveau.
As-tu des conseils à donner à ceux qui débutent dans la photo ?
Découvrir son propre style demande du temps, donc il est essentiel de ne pas hésiter à explorer différents genres avant de devenir un « spécialiste » de quoi que ce soit. Cette exploration peut être extrêmement enrichissante !

Soyez ouverts aux influences extérieures : une solide culture photographique est essentielle, mais n’oubliez pas de puiser votre inspiration dans d’autres formes d’art comme la littérature, le cinéma, la peinture. Tout cela contribue à construire en toile de fond vos connaissances sur la composition, la lumière, et d’autres aspects cruciaux de la création artistique.
Enfin, la copie est souvent un passage obligatoire pour vous familiariser avec les techniques et les styles. Ne craignez pas de vous inspirer des travaux d’autres photographes au début de votre parcours. Avec le temps, vous développerez votre propre identité artistique et vous pourrez vous en détacher pour créer des œuvres qui reflètent votre vision personnelle.

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Votre agenda photo de novembre 2023
Octobre passe et les arbres se couvrent de couleurs et tombent les feuilles autant que la pluie. Novembre est là et offre une ambiance automnale parfaite pour prendre des photos… ou bien se mettre à l’abri dans les galeries ! Malgré pluie et obscurité, les évènements photographiques ne manquent pas. Graine de Photographe vous propose ses idées sorties pour le mois de novembre 2023.
Découvrez sans plus attendre notre sélection d’événements photo près de chez vous en novembre !
Les expositions photo
L'Automne à L'Institut
Du 03 novembre au 24 décembre, L’institut pour la photographie de Lille présente huit artistes contemporains explorant divers enjeux d’actualité à travers leurs photographies. L’Automne à L’Institut expose des séries inspirées d’histoires singulières qui soulèvent un questionnement collectif de notre rapport au monde, de l’intime au politique. Les différentes formes du médium photographique sont ici explorées avec des photos aux démarches sensibles et réflexives.
Lieu : Institut pour la Photographie, Lille


The skeptics study of an optical phenomen de David de Beyter
Fondant ses recherches sur les principes de l’ufologie scientifique, l’étude des ovnis, David de Beyter travaille ses images pour jouer sur les motifs propre à la recherche des ufologues scientifiques. Chaque tâche éblousissante, chaque trait lumineux est un geste posé interrogeant la réalité capturée et la notion de vérité. Découvrez son travail, qui se rapproche de l’art documentaire, du 03 novembre au 24 décembre.
Lieu : Institut pour la Photographie, Lille
ManScapes de Sébastien Blanquet-Rivière
Du 04 au 30 novembre, la Galerie Pia Pia présente la série ManScapes de l’artiste photographe Sébastien Blanquet-Rivière. Ces quarantes monochromes explorent les tensions fertiles entre l’homme et son milieu, la vulnérabilité des corps et la permanence des éléments. Le corps est d’abord envisagé en studio tel une sculpture dont les courbes dessinent un paysage, puis en extérieur ou les lignes du corps se mêlent au paysage en une seule et même force vitale.
Lieu : Galerie Pia Pia, Bordeaux


Le Pis-Aller, Un étrange théâtre immobile
Un photographe, Jacques Péré, un dessinateur, Christian Gasset et un peintre sculpteur, Alban Caumont, travaillent ensemble sous le nom de Pis-Aller pour produire des images de personnages créés par leurs soins. Cette collaboration qui dure depuis trente-cinq ans a donné naissance à un étrange théâtre de l’immobile qu’ils qualifient « d’anti-mythe », détournant les images sanctifiées des cultes laïcs, entre dérision et respect. À découvrir du 07 novembre au 23 décembre.
Lieu : Arrêt sur l’Image, Bordeaux
Noir et Blanc : une esthétique de la photographie
Depuis le 17 octobre, cette exposition rassemble des chefs d’œuvre en noir et blanc des collections photographiques de la Bibliothèque nationale de France. Indissociable de la pratique photographique, le noir et blanc est mis à l’honneur, s’affirmant en temps qu’essence même de la photo. Les grands noms de la photographie sont réunis dans ce parcours présentant 300 images et 150 d’histoires.
Lieu : Bibliothèque François Mitterand, Paris


My-Lan Hoang-Thuy — Femme Actuelle
My-Lan Hoang-Thuy expose une série photographie où le corps fixe une continuité thématique échappant à toute tentative d’objectivation. L’artiste abolit les frontières du médium en convoquant peinture, dessins et arts graphiques aux côtés de la photographies. À découvrir jusqu’au 10 décembre.
Lieu : la MEP, Paris
Après l'été de Roberto Badin
Du 06 au 12 novembre, découvrez la série Après l’été de Roberto Badin à la Galerie Joseph. Une exploration à pieds de la ville de l’artiste offrant un regard intime et personnel sur les banalités de la ville. Dans ces expéditions, faites dans un rayon de 4 km, chacune des photographies se compose comme « un tableau où la lumière lui sert d’outil de construction ».
Lieu : Galerie Joseph, Paris


Paris + Klein, William Klein
Retour sur l’œuvre de William Klein pour le premier anniversaire de sa mort avec une installation unique composée de 33 tirages. De New York à Tokyo et de Rome à Moscou, Klein a saisi les villes, les rues, les trottoirs, les cafés et terrasses, les passants, les amoureux, les manifestants, toujours dans la vérité de l’instant, de l’inattendu et de l’accident. Le vernissage de l’exposition aura lieu le 9 novembre de 18h à 20h30. Celle-ci se tiendra jusqu’au 20 janvier.
Lieu : Polka Galerie, Paris
Sur la route de l'Orient, Marc Riboud & Steve McCurry
Du 10 novembre au 20 janvier, deux maîtres de la photographie sont réunis dans une même exposition ayant pour fil conducteur les voyages sur la route de l’Orient de Steve McCurry et Marc Riboud. En mélangeant épreuves vintages noir et blanc et tirages Fujiflex couleur, la Galerie Polka s’engage sur la route aux côtés des ces deux photographes. Le vernissage aura lieu le 9 novembre en présence de Steve McCurry et de Catherine Riboud.
Lieu : Polka Galerie, Paris

The Pigment Change d'Almudena Romero
À l’occasion de la sortie de son second livre, The Pigment Change, Fisheye Gallery expose le travail de l’artiste espagnole Almudena Romero. L’artiste obtient ses images en exposant des végétaux à des quantités de lumière spécifiques et des longueurs d’ondes particulières, créant des œuvres vivantes et éphémères. Almudena Romero sera présente lors du vernissage le 02 novembre et sera exposée jusqu’au 06 décembre.
Lieu : Fisheye Gallery, Paris
Réalités Désenchantées de Dina Goldstein
Du 09 au 30 novembre, Studio Idan expose trois séries de la photographe canadienne Dina Goldstein. « Fallen Princesses » replace les princesses de contes de fées dans un contexte de d’inégalité des genres. Dans « Gods of Suburbia » Goldstein juxtapose des divinités diverses à la vie dans les banlieues de métropoles. Sa série « In the Dollhouse » offre un commentaire sur les critères de beauté et les pressions sociales.
Lieu : Studio Idan, Paris


Silhouettes de Charles Fréger
En s’intéressant au costume en tant que marqueur de l’identité individuelle et de l’appartenance à un groupe, Charles Fréger poursuit depuis plus de vingt ans un inventaire photographique des communautés sociales, culturelles, professionnelles… dont il décrit les membres avec des portraits posés incluant leurs attributs caractéristiques. Le vernissage aura lieu le 17 novembre à 18h et l’exposition aura lieu jusqu’au 14 janvier.
Lieu : La Chambre, Strasbourg
La Fidelité des Ryhtmes de Lise Dua et Yveline Loiseur
Jusqu’au 19 novembre, Yveline Loiseur et Lise Dua invitent à une traversée des âges de la vie ; elles s’interrogent sur la temporalité au sein de nos existences et sur les cycles qui la ponctuent. De l’enfance à l’âge adulte, les êtres représentés ici sont pris dans une danse et des jeux qui les animent et les transforment. À la croisée des histoires, des expériences et des filiations, le corps est le lieu où s’inscrivent notre fragilité et notre résistance. Entre souvenirs de scènes et recompositions, Yveline Loiseur et Lise Dua déploient leurs images, empreintes de poésie, au sein de la petite galerie.
Lieu : Galerie Françoise Besson, Lyon

Paris Photo 2023
Rendez-vous au Grand Palais éphémère pour quatre jours forts en photographie avec l’édition 2023 de Paris Photo ! Du 9 au 12 novembre, Paris Photo propose à ses visiteurs un accès au monde de l’art et la possibilité d’approfondir leurs connaissances du médium photographique. Au programme : des expositions, des prix, des séries de conférences ainsi que des événements spéciaux explorant l’histoire de la photographie.

Strasbourg Art Photography
Durant tout le mois de novembre, Strasbourg Art Photography propose des évènements à travers la ville qui viendront ponctuer leur festival en ligne. Expositions, conférences, sorties de livres et rencontres viendront transformer ce festival de la photographie contemporaine.

Nuit du photojournalisme
La Nuit du Photojournalisme célèbre l’innovation dans le journalisme visuel avec des conférences et des projections de travaux de photojournalistes du monde entier. Rassemblant photographes, journalistes, éditeurs et collectifs, l’évènement sera l’occasion de participer à des échanges effervescents à Paris dans la nuit du 11 au 12 novembre.

Ce que vous pouvez encore voir de nos agendas précédents
- Un monde à guérir – Le Lieu Unique
- Bike Trip, USA, 1939 de Ruth Orkin – Fondation Henri Cartier-Bresson
- Capturer la beauté de Julia Margaret Cameron – Le Jeu de Paume
- Océans, l’odyssée immersive de Brian Skerry – L’Atelier des Lumières
- Les Mondes de Jill Freedman – La Galerie Rouge
- Inde(s) au pluriel – Galerie Le Réverbère
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Les Polaroïds de Robby Müller
Plus connu pour son travail de directeur de la photographie au cinéma, Robby Müller est pourtant un photographe très prolifique. Depuis 1974, il a pris plus de 2000 Polaroïds qu’il conservait précieusement dans une boîte chez lui aux Pays-Bas. Depuis sa mort en 2018, sa femme, Andrea Müller-Schirmer, travaille sur l’archivage des photos de Robby pour les présenter au grand public.
Que ce soit en tournage ou avec son Polaroïd SX-70 en main, le fil rouge de l’œuvre de Robby Müller est la lumière. Méticuleusement travaillée sur les plateaux et sans cesse étudiée avec ses photos, Robby était un photographe à l’œil sensible en adoration des ombres et des reflets. Pour présenter son travail, nous avons posé nos questions à Andrea Müller-Schirmer.
Robby Müller a commencé le Polaroïd sur le tournage de Alice Dans Les Villes (1974). Qu'aimait-il particulièrement avec ce médium ?
Pour ce film, il a pu essayer un prototype du Polaroïd SX-70. Ils ont ensuite utilisé l’appareil pour les photos de continuité sur le tournage. Tous les services sur le plateau l’utilisaient, il restaient donc beaucoup de pellicules qu’ils se sont partagé à la fin du tournage.
Je pense que Robby aimait beaucoup le résultat immédiat. Beaucoup de ses Polaroïds sont des études, des observations de la lumière et de comment elle se comporte. Ce sont des petites natures mortes.
C’était très appréciable de tenter une prise de vue et de voir directement comment elle évolue. En plus de cela survient l’intimité du format, les couleurs des films Polaroïds de l’époque (qui ne sont plus comme ça) et la douce texture de l’émulsion impalpable. Il l’aimait l’objet Polaroïd en lui même. Aujourd’hui sa singularité peut-être perçue comme un objet encore plus précieux parce qu’on reproduit beaucoup plus les images.
Robby a pris plus de 2.000 Polaroïds. Étaient-ils tous pour son propre plaisir ? Certains étaient-ils pris avec une certaine intention en tête ?
Robby ne prenait pas plus d’une quinzaine de photos au Polaroïd sur les tournages. Ils n’étaient pas forcément pris en lien avec la scène qui était tournée. En tant que directeur de la photographie il n’avait pas forcément le temps sur le plateau. Il devait travailler sur les lieux, être présent lors des répétitions, puis installer les lumières avant de commencer à tourner. Il maniait toujours la caméra lui-même.
Il prenait des photos durant son temps libre, les weekends, pendant ses voyages de vacances ou bien à la maison. Ces photos étaient pour lui-même. Il ne se voyait pas comme un photographe qui allait exposer. Son travail de directeur de la photographie était public, mais ses photos pour lui seul. On peut bien voir que ses photos sont l’expression naturelle de son œil esthétique, d’un esprit qui voit et pense naturellement la couleur et la composition; le mouvement et l’immobilité; la lumière et l’obscurité.
Serait-il resté en bonne santé plus longtemps qu’il aurait probablement publié ses photos lui-même. L’intérêt du public pour la photographie des réalisateurs — que l’on retrouve pour des collègues de Robby — a grandi ces dernières années. J’ai donc fait ce travail pour Robby.
Quelle était l'approche de Robby par rapport à la photo ? Jim Jarmusch disait de lui : "On trouvait le plus beau et le plus dramatique des paysages qu'on puisse imaginer et on lui tournait le dos pour filmer de l'autre côté. Robby m'a dit "c'est magnifique, mais on voit ça partout sur des calendriers ! Si on regarde par là, il y a un petit arbre et une pierre, c'est triste, émotionnel, tu vois ?" Pensez-vous que c'est un bon résumé de sa vision de la photographie et de la vie en général ?
C’est une citation que l’on peut plutôt mettre en relation avec le storytelling d’un film, où l’important n’est pas d’être frappé par un beau paysage mais de trouver une image qui colle au film. La grandeur et des lieux pompeux sont trop déconcentrants. Robby disait que s’il fallait tourner un dialogue dans la chapelle Sixtine, il ne serait pas nécessaire de la montrer dans toute sa grandeur. Il vaudrait mieux la filmer avec nonchalance.
Cette approche se retrouve aussi bien dans son travail photographique. Tout le monde peut prendre une belle photo d’un coucher de soleil. Robby cherchait la beauté dans le modeste, les choses mondaines. Il s’agissait d’être un observateur attentionné. Émotion et vérité étaient plus importants pour lui que des images spectaculaires.
Robby était surnommé "le Maître de la Lumière". Peut-on voir un lien entre la lumière et une certaine définition de la beauté qu'il aurait pu avoir ?
Je dirais qu’il était extrêmement sensible à la lumière. Cela prend également en compte l’absence de lumière, les ombres et toutes les graduations entre les deux, ainsi que les reflets et effets de miroirs. Il remarquait ça en permanence, en tous lieux. Je pense que c’était un observateur très fin et sensible. Il créait ses lumières sur les tournages avec cette même mentalité. Mais en lumière naturelle, il pouvait facilement réagir spontanément, ou bien attendre patiemment que la lumière soit bonne. Il comprenait le fonctionnement physique des ombres et de la lumière. Ce n’est pas la lumière qui le faisait voir les choses, ce sont les choses qui lui faisaient voir la lumière.
Le travail photographique de Robby Müller est resté pendant longtemps inconnu du public. Mais grâce à l’impulsion du réalisateur Steve McQueen et du travail d’Andrea Müller-Schirmer, ses Polaroïds et négatifs sont peu à peu scannés et archivés.
Ce laborieux travail permet à tout amateur de photographie et de cinéma de pouvoir baigner dans la lumière de Robby, de voir le monde à travers sa sensibilité.

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Thought Trails, l'errance de la pensée par Jackie Mulder
Jackie Mulder naît dans un petit village des Pays-Bas et grandit dans une famille religieuse très stricte. Face à cette situation, elle ressent très vite la nécessité de se trouver une échappatoire pour enfin s’exprimer en toute liberté. Son exutoire se présente alors à elle à travers la pratique artistique. Jackie quitte alors le foyer familial à 17 ans. Cet acte sera un point de départ pour l’artiste en devenir, qui éprouve le désir de dévier d’une norme étouffante, un sujet fortement présent dans son œuvre.
Avec sa série Thought Trails Jackie souhaite interroger notre perception de la photographie en repoussant les frontières du médium.

Thoughts Trails, une série en évolution perpétuelle
Le travail de Jackie Mulder consiste à ajouter des détails à ses photos à l’aide de médiums différents. Chaque œuvre est travaillée sans que l’artiste n’ait de finalité en tête. Le processus peut être plus ou moins laborieux, selon que Jackie souhaite conserver la photo d’origine intacte ou non. Le tirage se fait sur des supports divers, puis la photo est travaillée, découpée, cousue, cirée et l’œuvre évolue au fil de la pensée de l’artiste.
Jackie part à l’exploration de notre processus de pensée et ses observations sont résumées sur des photos visuellement et émotionnellement captivantes. Ces œuvres éphémères font résonner les photographies comme des images d’un rêve en noir et blanc, perçues au travers des couches de matériaux ajoutés.
Exploration du fil de la pensée
Thought Trails explore la conscience et la pensée humaine. Son point de départ est la volonté de se détacher d’un art déjà existant. De la prise de vue au produit fini, les œuvres de Jackie Mulder sont éphémères, inattendues. Elles surviennent. La retouche analogue donne aux photographies leur originalité dans un monde de consommation et de reproduction de masse des images.

Création, rébellion
L’expression artistique de Jackie Mulder est fortement liée à la jeunesse de l’artiste. Avec Thought Trails, elle s’exprime et se libère d’une oppression qui a pesé sur elle pendant de longues années.
L’art devient une thérapie et permet de s’exprimer et de se découvrir soi-même. On retrouve dans les travaux de Jackie un résumé de sa vie et de son parcours, depuis sa jeunesse très stricte jusqu’à son accomplissement en tant qu’artiste, en passant par ses études de design de mode et de graphisme. Le fil de sa pensée se matérialise concrètement sur ses photos avec de la couture à même le support.
Le tâtonnement est perceptible, comme un processus créatif métaphorique de l’évolution de la pensée humaine.

Quand on pense à la photographie, on a en tête une image en deux dimensions. Or les œuvres de Jackie Mulder trouvent un volume dimensionnel à l’aide du pinceau, de la paire de ciseaux et de l’aiguille. Chaque apport donné à l’image est un lien intime créé entre art et artiste. Ils deviennent le moyen d’appliquer une perception unique du monde. Art et artiste se transforment alors et se construisent l’un et l’autre.

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Les bons outils du photographe
Tout photographe a besoin de matériel essentiel à l’exercice de sa passion ou de sa profession. En photo, les accessoires sont multiples et varient d’une pratique photographique à l’autre. Portrait, paysage, street photography, tant de styles requérant du matériel différent. Voici donc nos conseils pour des outils indispensables à tous photographes.
Un appareil photo
Si vous lisez cet article, vous possédez sûrement déjà un appareil photo. Mais pour tous ceux que la photo intéresse, choisir un appareil photo n’est pas forcément chose aisée.
De nos jours le marché commence à se tourner vers les appareils hybrides. Des fabricants comme Nikon ont d’ailleurs déjà annoncé l’arrêt de production d’appareils reflex. N’ayant pas de miroir, les appareils hybrides sont souvent plus compacts et légers pour une qualité égale voire supérieure aux reflex.
En l’absence de miroir, l’image prévisualisée sera plus fidèle à la photo que vous allez prendre, mais la visée électronique videra vos batteries plus rapidement.
À vous de décider si vous souhaitez investir dans cette technologie. Hybrides et reflex restent relativement comparables au niveau de la qualité d’image. La décision finale devra donc prendre en compte l’ergonomie, le prix et l’adaptabilité.
Un (ou plusieurs) objectif(s)
Favoriser un appareil pouvant changer d’objectif est un plus pour tous ceux souhaitant faire de la photographie une pratique régulière. Le choix de votre objectif dépendra de la discipline à laquelle vous allez vous adonner. Un objectif grand angle (entre 14 et 35mm) sera idéal pour de la photo de paysage. Attention cependant à ne pas aller trop grand, auquel cas votre image risque d’être déformée. Pour la photographie urbaine, les focales de 35 mm et 50 mm sont souvent utilisées. Le portrait bénéficiera d’une utilisation d’une focale qui limitera la déformation des visages (entre 50 mm et 100mm).
L’utilisation d’un zoom permettra une plus grande adaptabilité sur le moment, sans avoir à changer d’objectif entre deux photos. Mais les focales fixes restent souvent moins chères et plus précises du fait de leur fabrication relativement plus simple.
Un sac
Que ce soit de la street photography, du paysage ou de la photographie animalière, vous serez sûrement amené à beaucoup marcher. Il est donc important de trouver un sac adéquat. Votre sac doit être léger et confortable afin qu’il ne pèse pas sur votre dos lors de longues sorties photos. De plus, il doit être durable et solide pour protéger au mieux votre équipement des impacts.
Optez pour sac compartimenté, qui vous offrira une meilleure protection du matériel, surtout si vous emportez plusieurs objectifs.
Un trépied
Un bon trépied saura vous ouvrir le champ des possibles. Du portrait au paysage, le trépied reste un outil essentiel. Réalisez vos poses longues sans effort et profitez de sa précision pour cadrer votre prise de vue à la perfection.
Pour ce qui est du choix du trépied, les éléments importants à prendre en compte sont le poids, la stabilité, la taille et le coût.
Il est préférable d’éviter les trépieds bas de gamme qui vous feront défaut à la moindre occasion. Investir dans un trépied solide vous garantira un compagnon indispensable pour des années de photos sans soucis.
Les accessoires
Vous avez votre sac ? Il est temps de le remplir ! En plus de votre appareil, ses objectifs et votre trépied, voici le matériel à ne pas oublier pour une sortie photo sans accroc :
- Des batteries de rechange. Même si vous avez chargé votre batterie à bloc, mieux vaut en emporter une ou deux supplémentaires, surtout si vous utilisez un appareil hybride, qui consomme plus qu’un reflex.
- Des cartes SD. Même si votre carte est vide, on sait tous que les photos s’additionnent vite lorsqu’on est sur notre lancée. Des cartes en plus vous éviteront d’avoir à supprimer des clichés sur le moment.
- Un chiffon microfibre. Un compagnon qui ne prendra pas de place dans votre sac. Il vous permettra de nettoyer votre objectif qu’il pleuve ou qu’il vente. Adieu gouttes d’eau et poussières intempestives.
Un ordinateur
Le post traitement des clichés est devenu une part importante de la photographie. À l’aide d’un bon ordinateur et de quelques outils numériques, vous pourrez vous aussi sublimer vos photos avant de potentielles impressions. Parmi ces outils indispensables, on ne mentionnera jamais assez Lightroom et Photoshop de la suite Adobe. Ces deux logiciels vont permettront une liberté de retouche et de modification incomparable.
Maintenant que vous avez votre matériel et que vos photos sont retouchées, que faire ? C’est l’occasion pour vous de réaliser des tirages ! Pour vous, vos amis ou votre famille, une belle photo bien tirée reste une attention toute particulière. Pour ce faire, il vous faut trouver un imprimeur, et là, il vous faut un service compétent. C’est votre travail dont on parle, après tout.
Saal Digital saura satisfaire vos besoins avec des impressions tous formats de qualité cristalline. Habillez vos murs avec des tirages tableaux, ou regardez vos photos en famille dans des albums conçus par vos soins. Votre créativité n’aura pas de limite pour passer vos photos de l’écran au papier !

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NIGHT DRIVE avec Jana Sojka
C’est il y a environ douze ans que Jana Sojka prend sa première photo. Elle dégote son appareil argentique dans un vide grenier à Bristol, vendu depuis un coffre de voiture. La photographie commence très innocemment pour l’artiste d’origine polonaise, qui a pour simple désir de capturer les petits moments simples de la vie.
De cette nécessité a fleuri une production artistique dense et caractéristique, mêlant la photo à d’autres pratiques artistiques. À la fois photographe, peintre, poète et colleuse, Jana Sojka ne partage pas simplement son univers avec ses œuvres. Elle nous invite à s’en imprégner, paisiblement, comme lors d’une balade en voiture sous un crépuscule fatigué.

Night Drive
Les photographies de NIGHT DRIVE sont saisies lors de balades en voiture à la tombée de la nuit. Pour cette série, Jana use de spontanéité. « Je ne sais jamais quel moment exact je vais photographier. Ce n’est qu’un bref aperçu du paysage qui défile ». Les images de NIGHT DRIVE sont prises sur le vif, sans préparation préalable.
« Il n’y a pas de plan, pas même de but. Je suis connectée au paysage et l’instant d’après je suis déconnectée. Le seul mouvement planifié est de sortir mon appareil photo. Je suis plus intéressée par l’exploration du temps et des possibilités qui me sont offertes pendant le trajet. » — Jana Sojka
Des photos travaillées de la rue à l’atelier
Le travail artistique de Jana va toutefois au-delà de la simple prise de vue. Dans son atelier, son « aire de jeu », tout commence par le choix du papier sur lequel la photo sera tirée. Elle retravaille ensuite les photos avec des médiums divers : aquarelle, peinture à l’huile, stickers, papiers ramassés et aussi de l’écriture. Une utilisation marquée du bleu, du rose et du flou volontaire renforcent ce style visuel propre à Jana.
Jana ajoute un peu de son propre univers au monde qu’elle capture sous son objectif et la retouche analogue de ses photos ajoute une touche de sincérité à son univers onirique.

« Mon processus dans le studio est très désordonné et chaque fois différent » — Jana Sojka
NIGHT DRIVE, une ode au crépuscule
Juste après le coucher du soleil survient le moment de la journée que Jana chéri tant, le crépuscule. Ce qu’elle apprécie particulièrement à ce moment, c’est la perte de distinction des choses dans les lumières bleutées profondes et le rose du soleil disparaissant sous l’horizon. « Je me dissous dans cette atmosphère » raconte l’artiste. « C’est un moment où l’on peut vraiment ressentir les couleurs et en faire l’expérience ».
La finalité du travail de l’artiste est la capture d’aperçus d’instants, teintés de ses émotions. L’important pour Jana n’est pas de présenter ce qu’elle voit. Elle souhaite inviter le spectateur à se faire sa propre perception de ses œuvres. Chacun ajoute aux photos de Jana ses souvenirs et son ressenti, faisant de son art une activité collective libératrice.
« Il ne s’agit pas de ma vision. Il s’agit de la perception que quelqu’un peut avoir de mon travail » – Jana Sojka
Avec son travail artistique, Jana a réussi à créer des œuvres caractéristiques et uniques. Empreintes de mélancolie, ces photographies sont un partage d’émotions sincères, un appel à l’interprétation et au dialogue avec l’artiste à travers son travail.
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Belles Mômes : le regard et la beauté par Clélia Odette
C’est après deux années d’études en psychologie que Clélia Odette ressent le besoin d’exprimer une réalité qu’elle décelait dans le champs des représentations de la femme. Plus qu’un désir artistique, Clélia perçoit la nécessité d’aller à l’encontre des images que l’on consomme quotidiennement. Désireuse d’étudier le cinéma, c’est pourtant vers la photographie que la vie la mène. À Bruxelles, elle se forme à la photographie documentaire et hérite la même année d’un Rolleiflex d’un parent. L’appareil devient alors son outil de travail de prédilection, à la fois œil et projecteur de sa perception du monde.

La genèse de Belles Mômes
Le projet « Belles Mômes » commence à fleurir dans l’esprit de Clélia Odette lors d’un trajet de covoiturage. Elle raconte : « Nous étions en hiver, le chauffage était au maximum. Une gynécologue, une retraitée et moi. Assise à l’arrière j’écoutais la conversation. La femme, autrefois avocate, parlait de la ménopause et de ses peines de coeur. Elle racontait qu’elle avait peur que son mari ne la regarde plus et ne la désire plus. Pour ne pas «faire son âge», Sylvie s’était fait tirer les rides et refaire les seins. Cette conversation m’a fait réaliser que pour une femme, vieillir pouvait être une angoisse, un fardeau ».
Regards croisés sur expériences échangées
Le projet ne s’est pourtant lancé qu’au bout d’un an, après qu’une première femme accepte de poser devant l’objectif de Clélia. Puis, grâce à la médiatisation de son projet, de plus en plus s’avancent pour participer. Clélia rencontre ainsi ces femmes, âgées de plus de 50 ans, pour les photographier. À la maison ou bien à l’hôtel, de longues conversations ont lieu entre la photographe et les modèles. L’échange est important — parfois fort, et une liberté totale est accordée aux modèles en ce qui concerne la pose, à l’exception d’une règle : ne pas sourire. Clélia Odette insiste : « face à une camera, le sourire a tendance à devenir une protection. Je cherche un regard sans détour. »
Plus que photographique, le projet est humain. Il ne met pas seulement en avant des corps mais des histoires, exprimées dans chaque ride ou chaque pli. Dans l’imperfection se trouve la beauté et c’est avec assurance que Clélia nous présente cette dernière.

Un regard pour changer les regards
À travers ses photos, Clélia souhaite dénoncer une réalité trop ancrée dans les moralités qui empêche aux femmes de vieillir sereinement. Le regard que l’on porte sur le vieillissement n’est pas le même sur un homme qu’une femme, et c’est de cette injustice que Clélia fait la critique franche : « à une époque où les mouvements pour l’égalité des sexes sont en pleine expansion, je voudrais remettre en question l’influence encore omniprésente du patriarcat sur la perception de notre corps. »
"Les hommes ne vieillissent pas mieux que les femmes; ils ont seulement l'autorisation de vieillir" - Mona Chollet, Sorcières, 2019.
Son travail doit être perçu comme un tout, comprenant l’échange, les interrogations et la prise de vue de ces femmes. Sa photo, bien que portraitiste, se rapproche plutôt du documentaire. C’est le moyen pour Clélia Odette de souligner ce tabou du vieillissement dans l’espoir de déconstruire notre regard.

Mais ce travail documentaire rencontre des obstacles qui ne rendent pas la tâche facile. À l’ère du digital et des réseaux sociaux, un·e artiste se doit souvent de se tourner vers Instagram pour partager ses œuvres. Mais dans un souci de dé-sexualiser la représentation féminine, Clélia se heurte à la censure de la plateforme qui détruit l’enjeu des travaux artistiques comme le sien. « La censure d’Instagram sexualise la femme et donc mon projet », explique-t-elle. « C’est toute une société qui en est impactée. Ça fait vendre, alimente nos complexes et dégrade notre rapport au corps féminin. De plus ce sont en très grande majorité des jeunes femmes qui nous sont montrées quotidiennement, retouchées — certes censurées — mais il n’y pas de représentation de femme âgées, de corps vieillissant naturellement ».
Pour partager son travail, Clélia se tourne alors vers d’autres plateformes comme Patreon, où tout le monde peut percevoir le message de son travail sans que celui-ci ne soit amoindri.

Quel avenir pour Belles Mômes ?
À la recherche de fonds pour faire avancer son projet, Clélia espère pouvoir aller à la rencontre de toutes ces femmes que son projet a touchées. Loin d’être achevé, on ne peut qu’espérer qu’il grandisse et permette à la photographe de collecter les récits et les photos en noir et blanc de femmes du monde entier. Avec pour objectif de faire paraître un livre de ses photos, Clélia compte bien dresser le vrai portrait de la femme de plus de cinquante ans dans le monde.

Clélia Odette — Patreon
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