Turbulences

Turbulences, Ben Thouard photographie la légendaire vague de Teahupo’o

Bercé depuis le plus jeune âge au son des vagues de la Méditerranée, Ben Thouard est un photographe sous-marin. À travers ses images, Ben transmet sa passion pour le surf, la mer, la vague. Installé en Polynésie française après avoir décidé de changer de vie, il photographie aujourd’hui les plus impressionnantes vagues au monde. Son terrain de jeu favori, la légendaire vague de Teahupo’o, à la fois le paradis et l’enfer des amoureux du surf. À travers sa série Turbulences, Ben se confronte aux éléments. Loin de vouloir les maîtriser, il se plie à leur volonté, à leur puissance. Bien que figée, la vague paraît poursuivre son mouvement. Le photographe repousse sans cesse les limites, s’approche au plus près de la vague et devient le témoin privilégié d’un instant qui semble hors du temps.

Turbulences
© Ben Thouard

Passionné d’océan et de photographie depuis toujours

L’océan fascine, l’océan attire, l’océan terrifie… Quoi que nous ressentions face à lui, il laisse peu de monde indifférent, et certainement pas Ben Thouard. Initié très tôt au surf par ses frères et emmené en mer par son père marin lorsqu’il n’était encore qu’un enfant; la mer a toujours fait partie de sa vie. En parallèle de cette passion, Ben découvrit l’art. D’abord par la peinture, il fut vite captivé par la photographie. Le premier appareil photo qu’il tient en main est un vieux boitier trouvé dans le grenier de ses parents. La passion est née.

Ce n’est qu’à l’adolescence que je découvre la photographie, lorsque je trouve par hasard un vieil appareil photo dans le grenier de mes parents. J’achète quelques pellicules, je shoot, j’échoue, je shoot encore… et je réalise que tout ce processus me fascine.

Ben Thouard

Turbulences
© Ben Thouard

Il suit alors une formation dans une école de photographie à Paris. Durant ces premiers mois, il apprend tout ce qu’il peut apprendre, et plus encore. Mais il est vite rattrapé par son obsession pour le surf, pour l’océan, qui ne peut être compatible avec la vie parisienne. Il décide alors de quitter l’école de photographie avant la fin. Il s’envole en 2006 pour Hawaii, où sa vocation va se dessiner.

Turbulences
© Ben Thouard

Coup de coeur pour Tahiti

Après cette expérience sur l’île d’Hawaii, Ben s’installe à Tahiti, où il fera la rencontre de la légendaire vague de Teahupo’o. Cette vague, bien connue des surfeurs qui la surnomment «la mâchoire», est particulièrement puissante et épaisse. Elle peut atteindre les 5 mètres de haut (parfois jusqu’à 10 mètres) et avoir près de 4 mètres de diamètre. Elle accueillera notamment les Jeux Olympiques 2024 de Paris. Ces caractéristiques font d’elle l’une des plus dangereuses vagues au monde. Teahupo’o signifie «montagne de crânes» en vieux tahitien… Explicite.

Je joue avec les limites, je me retrouve sous l’explosion de la vague, à quelques centimètres du récif.

Ben Thouard pour France Bleu

Turbulences
© Ben Thouard

Ben Thouard a photographié cette vague sous tous les angles. Que ce soit au-dessus ou en-dessous de la surface de l’eau; le photographe ne fait aujourd’hui pratiquement plus qu’un avec la vague. Et pourtant, celle-ci a toujours de quoi offrir au regard, à l’objectif. Après une série qu’il nomme Surface, qui comme son nom l’indique montre la puissance de la vague au-dessus de l’eau, c’est cette fois avec Turbulences que le photographe prend comme sujet la vague Teahupo’o.

Turbulences
© Ben Thouard

Turbulences

Cette fois, c’est principalement ce qui se passe sous la surface de l’eau qui est immortalisé par Ben. Même si des images de la partie au-dessus de l’eau sont également présentes puisqu’illustrant les turbulences de la surface.

En fait, sous cette vague de Teahupo’o, qui est une des vagues les plus puissantes au monde, il y a tout un spectacle, extraordinaire. Ces mouvements, on a vraiment une sorte d’explosion sous-marine quand la vague se brise, qui forme ces anneaux. Voilà, c’est des formes un petit peu surprenantes qu’on voit nulle part ailleurs et qui, moi en tout cas, m’ont fasciné. Et qui, je pense, intéressent pas mal de monde, même en dehors du milieu du surf, puisque c’est vraiment surprenant.

Ben Thouard pour France Bleu

Turbulences
© Ben Thouard

Les silhouettes des surfeurs domptant la vague, les remous, les textures, les détails, la puissance… C’est un nouveau regard que le photographe pose sur Teahupo’o. Cette série photo a demandé beaucoup de préparation, à la fois techniquement et physiquement. Certaines images demandent des mois. Et lorsqu’on photographie l’une des vagues les plus puissantes du monde, en étant dans l’eau à la nage, armé seulement d’un appareil photo dans son caisson étanche, il y a de nombreux risques.

Ce qui est complexe avec ces photos de vagues, c’est qu’on ne les prend pas depuis la terre ferme. On est littéralement dans l’eau, dans les rouleaux. Composer avec un environnement en mouvement demande de très bien le connaitre, et surtout, il faut que je sois sûr que mon matériel va réagir vite et bien.

Ben Thouard pour Lense

Turbulences
© Ben Thouard

Le goût du challenge

Techniquement, il faut beaucoup de connaissances, de maîtrise et le goût du challenge pour réaliser ces photographies. Lorsqu’on photographie sous la surface de l’eau, la lumière vient à manquer, la stabilité n’est pas au rendez-vous et l’imprévisible est de mise. Alors, quand on photographie sous la surface de l’impressionnante vague de Teahupo’o, c’est encore un challenge qui vient s’ajouter à la liste. 

Turbulences
© Ben Thouard

C’était à la fois un challenge physique, et un challenge technique également, puisqu’on se retrouve sous l’eau, il y a peu de lumière, il y a quelque chose qui est très rapide, qui est soudain, qu’on a du mal à prédire. Donc ça a été comme ça toute une sorte de challenges qu’il a fallu surmonter et qui est réuni dans ce livre «Turbulences».

Ben Thouard pour France Bleu

Turbulences
© Ben Thouard

Le livre photo Turbulences, le second après Surfaces de Ben Thouard est sorti en 2021. Vous pouvez le retrouver sur son site internet

Ben Thouard : SiteFacebookInstagram

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Topographies of Fragility

La fragilité de la Nature par Ingrid Weyland

Ingrid Weyland est une photographe originaire de Buenos Aires, en Argentine. Elle puise son inspiration dans le lien qu’elle entretient avec la Nature qui l’entoure. Elle joue à merveille avec les textures et la composition, qui apportent originalité et puissance à ses images. À travers Topographies of Fragility, Ingrid explore la relation entre l’Homme et la Nature; et tout particulièrement l’impact violent du comportement du premier sur la seconde. Elle se sert de son art pour réaliser une métaphore sur la fragilité de la nature mais également sur la fragilité de l’humanité elle-même, directement liée à celle de l’environnement.

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility II © Ingrid Weyland

Un parcours guidé par l’art

Issue d’une famille de sculpteurs et d’architectes. Elle grandit dans une maison avec ses grands-parents, au milieu de crayons de couleur, de papier à dessin, de plans, d’encre et d’argile. L’art et la composition ont ainsi plus ou moins toujours fait partis de sa vie. Elle réalise des études en design graphique mais se tourne rapidement vers la photographie. Elle travaille ainsi au croisement de différents matériaux et mondes.

Je m’intéresse de plus en plus au concept de « photographie élargie », où la photographie fusionne avec d’autres domaines des arts visuels, comme le collage ou différents types d’interventions manuelles. J’ai réalisé que la photographie pure ne suffisait pas à traduire mes expériences et mes préoccupations. J’ai donc décidé d’essayer de nouveaux modes d’expression en manipulant les tirages. J’aime expérimenter et défier les limites de la photographie, ainsi que mes propres limites.

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility IV © Ingrid Weyland

Sa série Topographies of Fragility explore la relation entre l’Homme et l’environnement; mais également la relation qu’entretient la photographe elle-même avec la Nature. La Nature a toujours fait partie de sa vie et de son travail, même lorsqu’elle réalisait davantage des portraits

La nature est, et a toujours été, mon « endroit sûr ». Il y a quelques années, j’ai eu l’occasion de voyager du sud de l’Argentine à la calotte glaciaire du Groenland, à la recherche de paysages à l’ambiance et à la beauté particulières. Ce sont des paysages vierges, presque surréalistes, où l’immensité de la Terre se révèle. Je me suis retrouvée à tisser un lien intime avec cet environnement.

Ingrid Weyland

La naissance de Topographies of Fragility

Elle fut particulièrement fascinée par les paysages qu’offre l’Islande. Cette île lui paraît sortie d’un monde inconnu, magique. C’est au milieu de ces endroits majestueux qu’elle a pris conscience du changement sur l’environnement et les paysages, conséquences de l’Homme et son comportement. Cette série rend à la fois hommage à la beauté envoûtante des paysages naturels; mais également à leur fragilité, de plus en plus visible. 

C’est à ce moment précis que j’ai réalisé que j’avais un besoin urgent d’inspirer le changement. J’ai senti que le simple fait de montrer de beaux paysages ne suffisait pas. Je voulais trouver un moyen de transmettre la beauté et la décadence en même temps. Je voulais que mon travail rappelle aux gens l’impact qu’ils ont et qu’ils s’arrêtent pour réfléchir à ce que nous risquons de perdre à cause du changement climatique.

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility V © Ingrid Weyland

La série d’Ingrid se caractérise par une méthode particulière qui en fait son originalité. En effet, la photographie contient une superposition de deux images d’un même paysage ; l’une en parfait état, l’autre froissée et positionnée sur la première. C’est fin 2019, en faisant du tri dans ses tirages ratés, qu’Ingrid froisse un de ses tirages et le jette à la poubelle. C’est alors que l’idée lui vint.

J’ai ressenti cela comme un sacrifice. Lorsque je me suis approchée et que j’ai regardé le papier froissé, il m’est apparu qu’il y avait un parallèle entre mon image froissée et la façon dont nous, les humains, traitons la nature comme si elle était jetable. Le mot « papier » a commencé à vibrer dans ma tête.

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility XXV © Ingrid Weyland

La réalisation des images

Le réel commencement de ce projet débuta lors d’un voyage au Groenland. La photographe admira alors les icebergs qui lui firent de nouveau penser, par leurs formes variées, à du papier froissé. De retour chez elle, le travail commença. Elle entreprit de remodeler les images de ses paysages afin d’en créer des différentes.

De la même manière, nous, les humains, modifions et endommageons notre environnement avec des conséquences parfois irréversibles.

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility XXIV © Ingrid Weyland

Pour aboutir à ce résultat, Ingrid expérimente toujours plusieurs types d’agressions, de la plus minime à la plus violente. Puis c’est tout un processus, de l’agression de la feuille à la superposition des images jusqu’à la rephotographie de l’ensemble.

J’imprime mon image principale en fine art, puis j’en tire des copies sur différents types de papier et en utilisant différentes méthodes d’impression, car chaque papier réagit différemment. C’est étonnant de voir comment le papier résiste au début, il se défend, il ne veut pas être détruit, mais à la fin, il doit céder…

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility VI © Ingrid Weyland

On dit qu’une feuille de papier froissée ne peut jamais retrouver sa forme initiale ; les lignes restent. De la même manière, la nature qui est envahie de manière irrespectueuse est à jamais brisée, et dans de nombreux cas irrécupérable.

Ingrid Weyland

Poursuivre cette série

Cette série est toujours en cours, et Ingrid aimerait pouvoir la poursuivre longtemps. Continuer d’apprendre et de comprendre le rôle de l’Homme sur son environnement et ce qu’il est possible de faire pour éviter l’irréparable.

Attirée depuis toujours par les territoires froids et glacés, elle aimerait se rendre dans des endroits tels que la Patagonie et le Groenland. Ces endroits du bout du monde la fascinent tout particulièrement.

J’ai toujours été attiré par les endroits froids et glacés. Je suis attiré par les paysages qui génèrent un sentiment de vide. Étrangement, ce vide me comble.

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility VIII © Ingrid Weyland

Les régions arctique et antarctique jouent un rôle clé dans l’avenir du changement climatique, car elles contribuent toutes deux à maintenir l’équilibre climatique de notre planète. J’espère pouvoir visiter l’Antarctique bientôt !

Ingrid Weyland

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility VII © Ingrid Weyland

Une expérience émotionnelle

Lorsque j’arrive dans un nouvel endroit, je prends généralement un certain temps avant de commencer à photographier pour me connecter à l’environnement et me familiariser avec mon entourage. Lors d’un de mes voyages en Islande, qui est un endroit où l’on sent que même la magie est possible, j’étais seule. Je marchais dans une vallée verdoyante et le long d’une rivière aux eaux cristallines, et je me suis tenu au-dessus d’un petit rocher. J’ai commencé à prendre des photos. J’ai complètement perdu la notion du temps, je suis entré dans un état de transe, c’était une atmosphère de rêve, le monde autour de moi a disparu. Ce qui m’a semblé être quelques heures plus tard, je me suis soudainement et brusquement « réveillée ». Je ne sais pas ce qui m’est arrivé ou ce que j’ai fait pendant ce laps de temps. Je sais seulement que je n’avais jamais ressenti ce sentiment de calme, de bien-être et de communion avec la nature auparavant.

Topographies of Fragility
Topographies of Fragility XXIII © Ingrid Weyland
Topographies of Fragility
Topographies of Fragility XXVIII © Ingrid Weyland
portrait Ingrid Weyland
La photographe Ingrid Weyland

Ingrid Weyland : Instagram

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orages et tempêtes par Maxime Daviron

Au coeur de la tempête avec Maxime Daviron

Maxime Daviron est passionné de photographie et d’orages. Bien que l’envie de lier ses deux passions lui apparaisse rapidement comme une évidence ; il attend plusieurs années avant de concrétiser ce projet. Il lui a fallu acquérir l’expérience nécessaire, en montagne comme en photographie, afin de capturer, le plus fidèlement possible, ces scènes dont il est un témoin privilégiéPhotographe professionnel, il part ainsi à la découverte de lieux naturels grandioses, qu’il fige dans leurs jours les plus survoltés. Ces images reconnaissent une place centrale à la Nature et son univers s’inscrit dans des ambiances surréalistes et oniriques. Cette série nocturne, ramification de « Terres Perdues » est aussi impressionnante que fascinante, et nous plonge au coeur de la tempête.

Nous sommes partis à la rencontre de Maxime, afin d’en savoir plus sur son univers photographique.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Pour commencer, pouvez-vous nous en dire plus sur vous et votre parcours ? Comment et pourquoi avez-vous commencé la photographie ?

Aussi loin que je me souvienne, la photographie a toujours occupé une place importante dans ma vie. Enfant, la moindre occasion était bonne pour traîner avec moi un appareil jetable de 36 poses (quand ça n’était pas le Kodak automatique de mes parents). La suite logique était donc le passage au numérique. Au départ sur quelques bridges Fujifilm. Mais le véritable déclic arriva dans la seconde moitié des années 2000, avec la naissance de ma passion pour les orages. Si je me contentais au début de les filmer, l’envie de figer la foudre sur une image fixe devint vite plus grande, me poussant à acquérir mon premier réflex à l’été 2008.

En parallèle des orages, j’ai alors commencé à chercher quelque chose de plus que le simple aspect « témoignage » de la photographie. C’est ainsi que s’est peu à peu formé l’embryon d’une démarche artistique, et l’envie de tenter d’en vivre. Après mon bac, j’ai donc intégré l’ETPA, une école de photographie toulousaine, de 2011 à 2013. Enrichi par cet apprentissage, j’ai directement pris mon premier statut d’indépendant. Neuf ans plus tard, je continue toujours dans cette direction.

Dès le début des années 2010, j’ai commencé à travailler par séries : certaines sont « permanentes », et ne cessent de se construire au fil des années. Tandis que d’autres sont réalisées sur de plus courts termes, généralement avec une unité de lieu et de temps. Toutes possèdent un propos, un concept et des influences qui leur sont propres.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Que cherchez-vous à transmettre à travers cette série ? 

Cette série est en réalité une ramification de « Terres Perdues », que je définirais comme mon travail photographique principal. C’est le plus important et personnel, centré sur des atmosphères de haute montagne.

Il émane une certaine puissance des hautes altitudes sauvages. Différents sentiments s’y entremêlent : fascinationangoissehumilité. Une étrangeté omniprésente éveille des instincts enfouis, ramenant l’esprit au stade d’une sorte de contemplation craintive face aux forces brutes qui semblent habiter ces immensités.

C’est de cet état de conscience introspectif que « Terres Perdues » puise ses racines. La démarche de la série est avant tout artistique : sous des influences picturales et cinématographiques, elle cherche à raconter une histoire à travers chaque image ; rassemblant les fragments de visions insoupçonnées dans l’idée d’évoquer un monde primitif, antérieur à l’anthropocène. En cela, les éléments climatiques les plus tourmentés agissent comme un révélateur, exacerbant le « sauvage » qui règne là-haut.

Pousser le concept encore plus loin, en liant cet univers vertical à celui des atmosphères électriques qui me fascinent tant, s’imposait alors comme une évidence. Une démarche qui, si elle semblait logique, aura dû attendre de longues années avant de se concrétiser. Le temps d’acquérir une expérience indispensable sur le milieu de la montagne, et les conditions climatiques qui lui sont propres. C’est une approche qui s’inscrit sur le long terme : car capter ces scènes « sans tricher » demande inévitablement de la patience – mais le propos réside aussi dans la véracité de ce qui est montré.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Quelles sont, selon vous, les difficultés majeures rencontrées dans la photo de nuit ?

Sans surprise, la difficulté dans le cas de la photographie nocturne est de réaliser une exposition correcte. J’essaie de faire en sorte que celle-ci soit aussi équilibrée que possible. À savoir sans zones sur ou sous-exposées, à moins que cela serve un propos artistique ou aide à retranscrire l’atmosphère telle que je l’ai perçue.

Outre les problématiques classiques comme celle du bruit numérique, viennent évidemment s’ajouter toutes les difficultés inhérentes à la photographie d’orages : il s’agit d’exposer correctement à la fois le paysage, mais aussi les éclairs. Un exercice d’équilibriste qui demande de conscientiser chacun de ses choix techniques, et de les maîtriser au mieux.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Quel matériel utilisez-vous pour réaliser ces images et quels réglages sont nécessaires pour capturer ces éclairs ? 

Du point de vue du matériel, pour le moment cette série est intégralement réalisée avec un Nikon D750 ainsi que trois focales fixes : 20mm, 50mm et 85mm. La question des réglages est cruciale. Car si la technique est simple sur le papier; elle demande en réalité un perpétuel apprentissage sur le terrain pour s’affiner au gré des différentes situations et contextes, chaque orage étant unique. Si la nuit permet de longues expositions, la prise de vue diurne demande en revanche l’utilisation d’un détecteur spécial, appelé « cellule de déclenchement ».

Dans tous les cas, il faut savoir s’adapter à de nombreux facteurs : intensité des précipitations, puissance des éclairs, déplacement de l’orage… Mais au-delà de l’aspect photographique, 90% du travail consiste en réalité à savoir faire ses propres prévisions à partir de données brutes. Il faut aussi apprendre à connaître et comprendre les orages à la fois dans la théorie et sur le terrain.

Le maître mot dans la photographie de foudre est l’anticipation : il s’agit de toujours conserver un temps d’avance pour ne pas se laisser surprendre ; que ce soit du côté des réglages ou de sa propre sécurité. J’ai justement rédigé un article sur le sujet pour le site Chasseurs d’Orages. Il compile tout ce qu’il faut savoir pour s’initier à la photographie de foudre (d’autres dossiers abordant les autres aspects de la pratique y sont également disponibles).

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Combien de photos réalisez-vous avant d’obtenir LA photo que vous conserverez ? 

Dans mon cas, pour cette série en altitude, j’ai souvent en tête une composition bien spécifique. La réaliser nécessite généralement plusieurs repérages, notamment pour trouver des abris adaptés. Parfois il faut de multiples tentatives avant que les conditions souhaitées soient réunies et que la foudre frappe à l’endroit espéré.

Ensuite, il faut garder à l’esprit que chaque orage produira un certain nombre d’éclairs, et donc autant de photos différentes. Parfois une poignée, parfois des centaines.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Que ressentez-vous lorsque vous vous retrouvez face à ces vastes paysages et à une nature qui se déchaîne ? 

Ces sentiments sont probablement les principaux moteurs qui animent cette obsession pour les orages d’altitude. Ils sont difficile à décrire, et c’est notamment l’objet d’une série de récits que je publie sur mon site. Celle-ci relate chaque saison orageuse dans la vaste région pyrénéenne et ses alentours.

Avant l’orage règne le silence de la haute altitude, l’esprit est dans l’expectative, c’est le calme avant la tempête.  Mais quand les éléments s’abattent sur les cimes, c’est une expérience qui submerge tous les sens et les exacerbe. Ces orages sont bien différents de ceux des plaines, que l’on a l’habitude de connaître – et infiniment plus intimidants. Le tonnerre se déforme jusqu’à parfois se changer en des sonorités d’un autre monde. La pluie, la grêle et le vent vont dévaler des falaises des torrents de gravillons, décrochant parfois des blocs plus massifs des parois ; le déluge fait émaner de la roche et de la neige une odeur minérale unique ; sans mentionner, évidemment, le spectacle qui se joue sous nos yeux. Pendant quelques minutes, parfois quelques heures, le monde extérieur cesse d’exister, et ne subsiste que cette atmosphère primitive et sauvage.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Il y a aussi ce sentiment presque mystique d’assister à des événements dont on ne devrait pas être le témoin. Comme si la montagne se refermait, et que nul ne devait plus s’y trouver.

Et à vrai dire, d’un point de vue plus pragmatique; il me semble important de préciser que c’est un peu le cas. Lorsque je réalise ces ascensions, je tente dans la mesure du possible d’en maîtriser tous les facteurs : je connais déjà le terrain, je sais où est l’abri où je dois me rendre, combien de temps il me faut pour le rejoindre. J’ai affiné mes prévisions jusqu’au jour J. Je sais à quelle heure je dois impérativement être en sécurité, avec toujours une marge confortable.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

En bref, je dois savoir où, quand et comment doivent théoriquement se former les orages, pour ne pas me retrouver exposé lorsqu’ils éclateront ; mais aussi être préparé et équipé pour la haute altitude. Il faut aussi savoir interpréter les signes sur le terrain. En effet, la prévision n’est pas une science exacte, d’autant plus en montagne. Enfin, à l’instant T, je dois respecter un certain nombre de précautions. Cela maximise ma sécurité, même si le risque zéro n’existe pas.

Toutes ces raisons expliquent pourquoi j’ai attendu d’avoir amassés des années d’expérience dans ces deux domaines avant de les lier. Car tout montagnard le sait, normalement cette combinaison est à fuir impérativement.

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

 

orages et tempêtes par Maxime Daviron
© Maxime Daviron

Voir la série complète Terres Perdues | Nocturnes

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Paysage minimaliste Rohit Rattan

Le monde minimaliste de Rohit Rattan, frontière entre imaginaire et réalité

Né en Inde, Rohit Rattan est un photographe qui a vu son intérêt pour la photographie naître et grandir à mesure qu’il voyageait. Très vite, il ressent le besoin d’illustrer les créations de son esprit à travers la photo. Son attrait pour les présences humaines dans des lieux inhabités au design minimaliste l’entraîne dans l’expression de son art en noir et blanc. Ses images, bien que simples et épurées, sont porteuses d’un message puissant et pertinent. Elevé au Moyen-Orient, le photographe y puise l’inspiration et y plante l’univers de ses photos. Entre rêve et réalité, Rohit nous transporte dans son monde minimaliste et onirique aux teintes monochromes et aux allures de songe impalpable.

Paysage du monde minimaliste de Rohit Rattan
© Rohit Rattan

Son univers photographique est à la fois minimaliste et puissant. Ses images sont rendues envoûtantes par la composition singulière et l’atmosphère créée par le photographe.

J’essaie de révéler une perception séduisante de l’espace et de la profondeur par un jeu lyrique de l’espace et des formes, en utilisant l’espace négatif dans les compositions. Ce qui procure au spectateur un sentiment de calme et de sérénité, en interprétant les émotions des moments capturés.

– Rohit Rattan

Paysage minimaliste Rohit Rattan
© Rohit Rattan

Une absence de couleur

Rohit joue également sur l’absence de couleur et un décor minimaliste pour explorer la solitude de manière subtile et artistique. Une sorte de retour à l’essentiel qui plonge par la même occasion le spectateur dans une réflexion personnelle.

En tant que photographe d’art, mon travail joue sur le contraste pour induire un monde surréaliste et minimaliste qui nous entoure avec une grande partie d’espace négatif pour amener les gens à voir le pouvoir de la photographie et ce qui reste invisible dans ce monde de saturation numérique.

– Rohit Rattan

Paysage du monde minimaliste de Rohit Rattan
© Rohit Rattan

Bien qu’il réalise également des photos en couleur, le noir et blanc reste un choix privilégié par Rohit. Il y voit une invitation à l’interprétation bien plus importante qu’avec la couleur. Selon le photographe, la couleur raconte une histoire complète et définie. Lorsque celle-ci se retire, l’histoire redevient incomplète. Cela laisse alors au spectateur la possibilité d’y raconter une partie de sa propre histoire.

 

Paysage minimaliste Rohit Rattan
© Rohit Rattan

Transmettre des émotions

En tant qu’artistes, les photographes peuvent, à travers leurs images, créer un impact sur celui qui observe. Par leurs choix réalisés derrière l’objectif, au moment de la prise de vue ou en post-production. Le rendu devient alors une oeuvre artistique et peut, selon Rohit, « littéralement changer la vie de quelqu’un ».

Le noir et blanc est également essentiel pour moi car – la couleur ne distrayant plus l’œil – le noir et blanc m’aide à mettre l’accent sur l’émotion de manière plus efficace et amplifie la manière dont l’espace négatif est utilisé dans l’ensemble.

Rohit Rattan

Paysage minimaliste Rohit Rattan
© Rohit Rattan
Pour obtenir ces images minimalistes aux allures de songes impalpables, Rohit allie parfaitement techniques de post-traitement et manipulation minimale. Il combine ainsi équilibre, inspiration et construction de l’image. Lors de la prise de vue, Rohit utilise un Canon R Mirrorless avec deux objectifs, un 50mm L series 1.2 et un 35mm L series 1.4. Il utilise également des filtres ND pour les prises de vue en pose longue.
Paysage du monde minimaliste de Rohit Rattan
© Rohit Rattan

 

Rohit Rattan : Site – Instagram

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chats artistes

Les chats artistes du Théâtre de Kuklachev photographiés par Alexander Khokhlov et Veronica Ershova

Alexander Khokhlov et Veronica Ershova sont ensemble dans la vie comme derrière l’objectif. Les deux photographes russes travaillent en effet régulièrement en duo et sont spécialisés dans le portrait, qu’il s’agisse d’une photographie conceptuelle ou du portrait d’un animal. Ils ont notamment réalisé une série sur les chiens et leur expressivité si particulière. Ils se sont cette fois-ci lancés dans le portrait des chats du seul et unique Théâtre de chats de Kuklachev, créé en 1990. Nous découvrons ainsi encore un peu plus ces petites bêtes, qui nous sont pourtant déjà bien familières.

chats artistes
© Alexander Khokhlov et Veronica Ershova

Fin 2021, Alexander et Veronica ont passé une semaine avec Dmitry Kuklachev, directeur de la troupe unique au monde, afin de photographier ses membres les plus charismatiques.

Nous avons reçu une invitation de Dmitry Kuklachev, qui dirige le théâtre en ce moment, pour réaliser le portfolio théâtral des artistes et nous avons trouvé cela intéressant. Faire un portfolio pour le seul et unique théâtre de chats au monde – c’est une grande opportunité à saisir.

Alexander Khokhlov

chats artistes
© Alexander Khokhlov et Veronica Ershova

Les artistes du Théâtre de chats de Kuklachev

Durant cette semaine, ils ont photographié environ 40 des quelques 100 artistes à fourrure vivant et travaillant dans le théâtre. Forts de leur expérience précédente de portraits de chiens, le couple de photographes était déjà familier avec le portrait animal. Cependant, travailler avec des chats est, selon eux, très différent d’une séance photo avec des chiens. En effet, les chats sont moins émotifs et moins concentrés que leurs camarades canins. Il était pourtant nécessaire de capter au mieux leurs expressions et la personnalité de chaque animal. Pour cela, il faut arriver à les rendre calmes et détendus grâce au jeu.

chats artistes
© Alexander Khokhlov et Veronica Ershova

Jouer avec les chats a permis aux deux photographes de réaliser leurs photos avec des sujets relativement calmes et attentifs. Grâce à leur approche, Alexander et Veronica ont réussi à faire apparaître le caractère et la personnalité de chaque félin. Le résultat est à la fois amusant et touchant. La photo est rendue si spéciale grâce au regard captivant de ces chats, posant face à l’objectif.

Nous aimons vraiment les chats. Et les chiens. Et les chevaux. Tous les animaux ! Il est impossible de faire un bon portrait d’animal si vous n’aimez pas vos héros. Ils sont tous géniaux et uniques et nous les aimons absolument.

Alexander Khokhlov

chats artistes
© Alexander Khokhlov et Veronica Ershova

Alexander Khokhlov : SiteInstagramFacebook

Veronica Ershova : InstagramFacebook

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Exposition GrianedePhoto Academy 14

La Grainedephoto Academy expose ses photos futuristes !

Toute l’équipe de Graine de Photographe est fière d’exposer les réalisations de nos talentueux académiciens ! La 14ème promotion de notre GrainedePhoto Academy s’achève à l’issue de ces 6 mois de formation. Rencontres, apprentissage, expression artistique, ces derniers mois ont été particulièrement riches pour nos élèves !

Retrouvez leurs photos exposées dans notre galerie sur l’Île Saint-Louis à Paris du 15 mars 2022 au 17 avril 2022.

Exposition GrianedePhoto Academy 14
Photos © Clémence Foltran

Pour cette Academy, nos deux groupes de photographes en herbe ont été challengé sur le thème Futuriste. Guidés et conseillés par les talentueux photographes professionnels Pierre Nicou et Patrick Sagnes, les élèves ont exploré leur propre univers artistique.

Vous êtes les bienvenus pour le vernissage qui aura lieu le jeudi 17 mars à 18h.

Voici une sélection de ce que vous pourrez observer sur nos murs très prochainement :

Exposition GrianedePhoto Academy 14
© Isabelle Chassaing
Exposition GrianedePhoto Academy 14
© Muhamad Syazwan Bin Othman
Exposition GrianedePhoto Academy 14
© Marie-Claire Ferrant

Exposition GrianedePhoto Academy 14

La Grainedephoto Academy, c’est 6 mois de formation pour débutants et d’apprentissage de l’ensemble des bases techniques de la photographie. Mais c’est également l’occasion de développer sa créativité grâce à différentes thématiques :

GrainedePhoto Academy

Toutes les photos sont exposées à la galerie grainedephotographe.com, sur l’île Saint-Louis à Paris
du 15 mars au 17 avril 2022
14 Quai de Béthune 75004 Paris
(Visites sur demande les lundi, mercredi et vendredi, de 10h à 18h.
Veuillez nous contacter au 09 80 39 42 35 pour prévoir votre venue).

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When the Trees Are Gone

Le regard sur la ville et la nature de Diana Cheren Nygren

Diana Cheren Nygren est originaire de Boston, Massachusetts. Elle explore, par la photographie, la relation entre l’Homme et son environnement, qu’il soit urbain ou naturel. La photographie a toujours plus ou moins fait partie de sa vie, mais aujourd’hui elle en fait un art. Avec When the Trees Are Gone, Diana combine trois sujets qui lui tiennent à cœur ; les gens à la plage, les paysages urbains et les ciels dramatiques. Cette série, débutée un peu par hasard et par curiosité, a fini par raconter une histoire pour tous ceux qui la regardent. Elle nous offre une réflexion sur la place de la nature dans nos villes et nos vies.

When the Trees Are Gone
Mars Invasion © Diana Cheren Nygren

Une photographie artistique

Même si la photographie fait partie de sa vie depuis ses 16 ans, ce n’est que récemment qu’elle la pratique en tant que forme artistique. Étudiante en histoire de l’art à l’université, elle porte un intérêt tout particulier aux femmes photographes. Elle s’inspire notamment des travaux de Diane Arbus et Cindy Sherman.

Après l’université, j’ai échappé à mon travail quotidien sans âme en suivant des cours et en travaillant dans la chambre noire de la New England School of Photography le soir. Non seulement la pratique de la photographie, mais aussi la communauté qui l’entoure, sont rapidement devenues mon refuge.

Diana Cheren Nygren

When the Trees Are Gone
Bottled Water © Diana Cheren Nygren

C’est une fois ses enfants grands et davantage de temps libre que Diana se consacre exclusivement à la photographie. Sans savoir exactement où elle va, elle découvre rapidement qu’elle aime travailler avec des images photographiques pour en créer des nouvelles. Elle aime ainsi créer quelque chose de nouveau, pouvant avoir un impact social plus important.

Elle s’est alors demandé ce que donnerait la combinaison de ses trois sujets favoris, les gens à la plage, les décors urbains et les ciels dramatiques. Diana commence ainsi à photographier sur la plage, elle n’y va jamais sans son appareil photo. Elle insère par la suite, grâce à Photoshop, ses décors et ses ciels. Si les premières compositions ont un fort côté humoristique et absurde, elles ont peu à peu raconté leur histoire. L’ensemble de l’œuvre disait progressivement quelque chose d’important et de compliqué sur le changement climatique.

When the Trees Are Gone
Rooftop Pool Number 2 © Diana Cheren Nygren

Une composition minutieuse

Techniquement, la photo se compose de trois images distinctes. Diana photographie les paysages urbains des villes dans lesquelles elle voyage ou lors de ses promenades à Boston. Les personnes présentes sur ses photos, prises à la plage, sont placées hors de leur contexte dans ces paysages urbains.

Photographier les gens à la plage est à peu près mon activité préférée. Dans l’ensemble, ils sont heureux, inconscients, détendus, chacun dans un monde indépendant et autonome. Je pense que l’expérience de passer du temps sur la plage, de communier avec l’océan et de respirer l’air salin, est vraiment profonde. C’est ce qui a motivé en partie ce travail. Que se passe-t-il si vous prenez ces personnes détendues et inconscientes et que vous ne changez rien d’autre que leur cadre ? Si vous les placez en ville, ont-ils l’air différent ou se sentent-ils différents ?

Diana Cheren Nygren

When the Trees Are Gone
Loading Dock © Diana Cheren Nygren

Quant aux ciels, ils sont généralement pris depuis le porche du troisième étage, à côté de son bureau. Ils sont insérés en dernier dans l’image. Chaque photo est prise assez spontanément, au fil des rencontres de Diana, des paysages qu’elle sillonne et des ciels dont elle est témoin. En revanche, la construction de l’image par la suite est une étape minutieusement réfléchie et travaillée. Il faut essayer des combinaisons entre des milliers d’images pour trouver la bonne, celle qui fera la photo parfaite.

Une sorte de version floue de mes archives photographiques vit dans ma tête. Ainsi, je regarde la photo d’une personne sur la plage et je me souviens d’une photo urbaine que j’ai particulièrement aimée et qui ferait un bon décor. Et il y a beaucoup d’essais et d’erreurs. Il m’arrive de devoir essayer une personne sur la plage dans trois ou quatre scènes urbaines différentes avant de trouver la bonne.

Diana Cheren Nygren

When the Trees Are Gone
Posers © Diana Cheren Nygren

Une réflexion sur notre société, la ville et la nature

À travers When the Trees Are Gone, c’est une introspection sur notre sociéténotre avenir et le climat qui s’impose à nous. Cette série a eu un impact sur la photographe mais pousse également le spectateur à la réflexion. Comment la ville et la nature peuvent s’allier pour enrayer le changement climatique ? Que sera notre avenir dans une société faite pratiquement exclusivement de béton et de goudron ? Cette série a poussé la photographe à réfléchir à ce qui peut changer dans la vie urbaine. Mais également à être plus attentif à l’impact de chacun de nos choix sur le climat.

Ces deux dernières années, en vivant avec ce travail mais aussi en faisant l’expérience de la pandémie, en réfléchissant à la vie urbaine et à sa relation avec le monde naturel, et en lisant beaucoup sur le changement climatique, ma perception a changé si complètement qu’il est difficile de se rappeler ce que je pensais lorsque j’ai commencé ce travail. Mais l’ensemble du processus a eu un impact profond sur moi.

Diana Cheren Nygren

When the Trees Are Gone
Into The Green © Diana Cheren Nygren
portrait Diana Cheren Nygren
La photographe Diana Cheren Nygren

Diana Cheren Nygren : SiteInstagramFacebook

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Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre

Interview – Yves Marchand et Romain Meffre immortalisent les théâtres en ruine

Photographes français passionnés par les ruines et les lieux abandonnés, Yves Marchand et Romain Meffre se rencontrent en 2002. Cette passion commune et leur attrait pour l’urbex les invitent rapidement à former leur talentueux duo. C’est d’abord en région parisienne qu’ils entament leurs explorations, chacun accompagné de son appareil photo. Cette coopération les amène à voyager à travers le monde à la recherche de ruines à explorer, à photographier. Avant de consacrer leur appareil aux théâtres américains, ils partent sillonner la ville de Détroit, capitale industrielle du XXème siècle; à la découverte de ses rues et immeubles délaissés, vestiges d’une époque révolue.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
UPTOWN THEATER, RACINE, WI, 2014 © Yves Marchand et Romain Meffre

Avec la même ambition et soif d’exploration, ils débutent en 2005 un long périple photographique à travers les routes du Nord de l’Amérique. Ils sont alors à la recherche des monuments ayant fait la gloire du théâtre et du cinéma au début du XXème siècle. Ces théâtres américains, lieux d’une vie paraissant lointaine, sont fascinants par leur architecture et leur atmosphère. Nous sentons leur histoire palpable, omniprésente, parfaitement retransmise par les images des deux photographes. Ces théâtres sont, pour une partie, rénovés et transformés pour accueillir des activités diverses, créant un contraste saisissant entre l’ancien et le moderne. Nous sommes partis à la rencontre de Romain et Yves pour en savoir plus sur ce projet ambitieux, illustré dans leur dernier livre photo, Movie Theaters.

Comment vous est venu l’envie de travailler tous les deux, de former votre duo ?

Nous nous sommes rencontrés en 2002 et avons commencé à faire des visites de lieux en ruine ensemble, principalement en région parisienne. Nous travaillions à l’époque au 35 mm, chacun avec notre appareil. Nous nous réunissions souvent pour scanner et travailler sur nos images ensemble. Nous sommes allés à Detroit en 2005 et avons eu l’opportunité de faire notre première exposition l’année suivante; avec les photographies que nous avions chacun réalisées. Nous avons, à la suite de cette première expérience en galerie chacun acheté une chambre photographique 4×5 pouces, qui est le “petit” des grands formats, nous garantissant ainsi encore une certaine mobilité dans nos prises de vue.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
PARAMOUNT THEATER, NEWARK, NJ, 2011 © Yves Marchand et Romain Meffre

Nous sommes repartis aux Etats-Unis pour continuer notre travail sur l’ex-capitale de l’automobile et entamer la série sur les salles de spectacle en octobre 2006. Au fil de ce séjour de 3 semaines, nous nous sommes naturellement mis à n’utiliser plus qu’un appareil pour deux. C’était finalement le moyen le plus logique et efficace de produire un point de vue qui nous satisfaisait tous les deux, scellant donc notre travail en tant que duo.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
PARAMOUNT THEATER, LONG BRANCH, NJ, 2009 © Yves Marchand et Romain Meffre

Qu’est-ce qui vous attire dans ces lieux délaissés, parfois totalement en ruine ?

Cela tient au départ à une curiosité assez candide que beaucoup d’entre nous éprouvent face aux ruines, un mélange entre la répulsion et la fascination face à cet objet, qui nous renvoie directement à notre propre finitude. Lorsque l’on visite, il y a aussi l’excitation de la découverte et de la transgression. On se prend à jouer les explorateurs et archéologues amateurs. Très vite on essaye de comprendre le mystère de ces histoires qui semblent s’arrêter du jour au lendemain… Un mur patiné, qui signifie le passage du temps et une certaine évolution, est bien souvent plus évocateur qu’un lieu neuf, ou patrimoinisé, contrôlé. La visite de ces ruines constitue finalement presque une forme de parcours initiatique. Tout cela se conjugue pour devenir rapidement une “activité” exotique, ludique et passionnante.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
METROPOLITAN OPERA HOUSE, PHILADELPHIA, PA, 2012 © Yves Marchand et Romain Meffre

Que recherchez-vous à transmettre à travers ces images ?

Nous cherchons à la fois à transmettre le sentiment que l’on éprouve lors de nos visites, et à produire un document historique sur des lieux dont la nature même va les conduire à changer, et malheureusement bien souvent disparaître. À sa modeste échelle, le rôle des photographes et autres explorateurs de ruines; ou de lieux oubliés ou peu documentés; est en quelque sorte d’enregistrer ces vestiges qui demeurent comme la mémoire presque subconsciente de nos sociétés. Et par leur enregistrement tenter de les réintroduire dans le flot de notre mémoire collective.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
LOEW’S KINGS THEATER, BROOKLYN, NY, 2007 © Yves Marchand et Romain Meffre

Pourquoi avoir choisi de vous consacrer aux théâtres pour cette série ?

Nous aimons les édifices spectaculaires qui encapsulent une destinée collective et qui ont eu une importance assez significative pour être construits à des échelles industrielles. C’est évidemment le cas des usines, mais aussi des immeubles de rapport de Budapest par exemple; et notamment les salles de spectacle nord-américaines. Ces auditoriums étaient destinés à séduire et sont donc aussi un fantasme d’architecture exotique et pseudo-historique que nous trouvons toujours émouvant. Les architectures outrancières étaient en quelque sorte presque une recherche d’identité dans un pays de synthèse aussi jeune et éclectique que les Etats-Unis. Ces salles de cinéma ont évidemment une importance culturelle capitale dans nos sociétés. Leur déclin, évolution et ré-hybridation comme supermarché, église, etc… a une puissance symbolique et visuelle très forte.

Que ressentez-vous lorsque vous découvrez un lieu riche d’histoire à l’abandon ?

C’est toujours assez émouvant, spécialement quand le lieu est si intact qu’il est très facile d’y projeter son imagination. Encore plus lorsqu’il s’agit d’une surprise, d’un lieu où l’on n’avait pas anticipé ce que l’on allait trouver. Ensuite, l’expérience de visite d’un lieu à l’abandon est parfois si forte, qu’elle limite notre imagination en tant que visiteur. Il y a parfois une relative tension sur place due aux conditions de délabrement ou d’accès à un lieu. Il faut essayer d’avoir un regard relativement distancié par rapport au lieu. Disons que l’effet sur l’imagination du spectateur, qui découvre ces images avec moins de contexte, est parfois sûrement plus fort que sur la nôtre; ou en tout cas différent.

Urbex théâtre par Yves Marchand et Romain Meffre
RKO FLUSHING THEATER, QUEENS, NY, 2007 © Yves Marchand et Romain Meffre
Les photographes Yves Marchand et Romain Meffre
Les photographes Yves Marchand et Romain Meffre © Jean-Charles Duban

Yves Marchand et Romain Meffre : Site – Instagram – Facebook

Découvrez Movie Theaters, le dernier livre photo de Romain Meffre et Yves Marchand.

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Humanæ

Humanæ – Les portraits universalistes d’Angelica Dass

Née à Rio de Janeiro, Angelica Dass est une photographe primée et reconnue pour son projet à renommée internationale, Humanæ. Elle vit et travaille aujourd’hui à Madrid. Par son travail, Angelica voyage à travers le monde et rencontre des personnes de tous horizons. Combinant la photographie et la recherche sociologique, Humanæ est une ode à la diversité et la tolérance. Elle y montre que chaque être est spécial, unique, à commencer par la couleur de sa peau.

Humanæ
© Juan Miguel Ponce, Valencia

Une couleur propre à chacun

Angelica est issue d’une famille où la couleur de peau n’a aucune importance. Comme elle le dit elle-même, sa famille est très colorée. Son père est né d’une mère à la peau d’une intense couleur chocolat. Il fut ensuite adopté par une mère à la peau de porcelaine et par un père entre le yaourt à la vanille et celui à la fraise. La mère d’Angelica est fille d’une indigène brésilienne à la couleur de peau entre noisette et miel. Parmi ses tantes maternelles, l’une a la peau couleur de cacahuète, l’autre comme une crêpe. Ces descriptions affectueuses, faites avec humour par la photographe, montrent toute la diversité de pigmentation de notre peau.

Si au sein de sa famille, la diversité est accueillie chaleureusement, c’est une toute autre histoire dans le monde extérieur. Discrimination, jugement et remarques, la liste est longue quant aux différences de traitement observées en fonction de la couleur de peau.

Aujourd’hui, et depuis pratiquement toujours, la couleur de peau fonde notre identité aux yeux du monde. Blanche, noire, rouge, jaune, autant d’étiquettes attribuées à chacun. Mais ces quatre couleurs bien définies correspondent-elles à la réalité ? Sommes-nous réellement « noir » ou « blanc » au sens le plus littéral des termes ? Dans une société prônant l’inexistence de la « race », pourquoi continuer à décrire les humains de cette manière si dichotomique ? Avec plus de 4000 portraits de volontaires aux profils extrêmement variés, photographiés aux quatre coins du monde, Angelica Dass affirme qu’elle n’a jamais vu quelqu’un pouvant être encadré dans du blanc ou du noir.

Magnifier la diversité

Je me souviens, quand j’étais petite, du jour où la maîtresse est entrée en classe et m’a présenté un crayon de couleur appelé « chair ». J’étais faite de chair. J’étais marron, mais les gens disaient que j’étais noire. J’avais sept ans et j’avais une confusion de couleurs dans ma tête. Des années plus tard, j’ai épousé un espagnol rose, le genre qui, cinq minutes au soleil, est déjà rouge comme une crevette. Après cela, une question a commencé à me hanter : de quelle couleur sera mon enfant ? Évidemment, ce n’était pas important pour moi, mais cela semblait être très important pour les autres. Alors, avec toutes ces questions en tête, j’ai utilisé mon métier, la photographie, pour trouver une réponse à tout cela.

Angelica Dass

Au commencement de ce projet, les premiers portraits réalisés sont ceux de ses amis et sa famille. Puis, de plus en plus de personnes rejoignent le projet et lui donnent une dimension internationale. Le projet reçoit alors un très bon accueil. La photographe est invitée à parler de son travail, des expositions lui sont consacrées dans des musées et des galeries. Les rues se voient également investies de ces centaines de portraits, rendant ainsi le projet accessible à tous.

Humanæ
Humanæ © Angelica Dass

We all together built Humanæ.

Angelica Dass

Les portraits d’Angelica possèdent tous un arrière-plan teinté d’un ton de couleur identique à un échantillon de leur peau. Elle photographie d’abord ses sujets en studio sur un fond blanc. Puis elle choisit un carré de 11 x 11 pixels prélevé sur le nez du sujet. Le fond est par la suite associé à la couleur correspondante dans la palette industrielle Pantone®. Cette palette, par sa neutralité, défie les contradictions et les stéréotypes liés au sujet de la race.

Humanæ dès le plus jeune âge

Positionnons la diversité comme une valeur dans l’expérience éducative et comme une source de richesse et d’apprentissage sur nous-mêmes et sur les autres.

Angelica Dass

Les premiers ambassadeurs du projet sont les professeurs, les enseignants. En effet, ces derniers utilisent Humanæ comme un outil pédagogique. Pour Angelica, l’école est le lieu où un dialogue sur ces questions importantes de diversité et de respect de l’autre doit être créé. Ainsi, au-delà de l’aspect esthétique de l’œuvre, Humanæ vise à sensibiliser et instruire, autant les enfants, les étudiants que leurs parents.

Humanæ
Angélica Dass speaks at TED2016 – Dream, February 15-19, 2016, Vancouver Convention Center, Vancouver, Canada. Photo: Bret Hartman / TED

Ne parlons pas de la diversité parce que nous devons en parler. Parlons de la diversité parce que c’est, en fait, ce qui existe sur la planète où nous vivons et l’essence même de l’espèce humaine. Et si c’est à l’école et dès le plus jeune âge, tant mieux.

Angelica Dass

portrait Angelica Dass
Angelica Dass photographiée par Inés Villeparisis

Angelica Dass : SiteInstagram

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Lake Sammamish par Laura Zimmerman

Lake Sammamish : Le projet ICM de Laura Zimmerman

Depuis le nord-ouest du Pacifique, où elle réside, Laura Zimmerman photographie les paysages qui l’entourent. Photographe portraitiste à la retraite, c’est lors de la pandémie qu’elle se lance dans la technique photographique de l’ICM (Intentional Mouvement Camera), nous offrant ainsi de sublimes images. Cette technique consiste à ralentir la vitesse d’obturation et à réaliser des mouvements volontaires avec l’appareil photo pendant que l’obturateur reste ouvert. Avec Lake Sammamish, nous entrons dans l’univers de Laura, mélange de couleurs vives, de paysages abstraits et de doux mouvements.

Serpentine Hills © Laura Zimmerman

La photographie s’est imposée à elle dès la naissance de ses enfants. Elle aime les photographier afin de conserver ces instants brefs de l’enfance, les changements constants de ces petits êtres. Ce sont ces instants fugaces, parfois presque imperceptibles, qu’elle recherche dans ses photos, que ce soit en tirant le portrait de ses sujets qu’en capturant les paysages qu’elle rencontre.

Je pense que ce qui m’inspire, ce sont ces moments éphémères que l’on ne peut pas saisir à nouveau, qui sont là puis disparaissent. Les couleurs du lever du soleil, les ombres mouvantes, un coin de brouillard, un sourire rapide, ce genre de choses.

– Laura Zimmerman

Pot of Gold © Laura Zimmerman

Intentional Mouvement Camera

La première fois qu’elle observe l’ICM, celle-ci est appliquée à un bosquet d’arbres. Elle est alors immédiatement séduite par la douceur et la dimension impressionniste de l’image. En effet, cette technique permet d’adoucir les traits. Ainsi, toute dureté s’évanouit et laisse place à une réalité alternative paisible. Ses clichés sont pour elle source de paix et de sérénité. La combinaison de couleurs vives et de mouvements doux lui procurent des émotions l’aidant à se protéger des mauvaises actualités du monde extérieur.

Notre monde a été assez tumultueux ces derniers temps, et l’idée d’en créer une version plus douce me plaît beaucoup.

– Laura Zimmerman

Storm Front © Laura Zimmerman

Lake Sammamish ICM Project

La série Lake Sammamish ICM project a été imaginée et produite par Laura durant la pandémie. Alors confinée et privée de tout autre paysage que ce lac qui avoisine son jardin, elle le photographie chaque jour. Le résultat n’est jamais le même. En effet, le paysage change au gré des couleurs mais également des mouvements réalisés. Dans un premier temps à la recherche d’un résultat doux, rendant la réalité plus subtile, elle s’exerce par la suite à créer ses propres paysages grâce à des mouvements plus exagérés. Ainsi, elle dévoile aux yeux de tous ces paysages cachés.

Le fait que ces paysages secrets ne soient disponibles qu’à un certain moment me semble extraordinaire, car les conditions qui permettent de créer ce paysage caché – les couleurs uniques du lever du soleil, la position des nuages, le mouvement exact de la caméra – ne se reproduiront jamais plus.

– Laura Zimmerman

Midgard © Laura Zimmerman

Après avoir photographié tant de fois ce lac, Laura pense à d’autres horizons, plus lointains. Elle adorerait par exemple aller explorer l’Islande, appareil photo en main. Elle y capturerait ces paysages impressionnants, avec l’ICM et ainsi continuer à façonner un monde entre songe et réalité.

Rosy Fingers of Dawn © Laura Zimmerman

Saddle Butte

Bien que ses photos définissent de nouveaux horizons, elles peuvent parfois recréer en quelques sortes des lieux connus de la photographe. C’est par exemple le cas avec « Saddle Butte ». Cette photo reforme, comme resurgi du passé, la butte du même nom, surplombant la ville natale de l’artiste.

Là où j’ai grandi, dans le centre-nord du Montana, il y a une butte appelée Saddle Butte. Elle se trouve dans les plaines qui surplombent ma ville natale et a une forme très particulière. Le mouvement aléatoire de l’appareil photo dans « Saddle Butte » rappelle la forme de la butte. La couleur de l’eau était semblable à celle des champs de blé et le ciel ressemblait beaucoup à celui du Montana au lever du soleil. Il est très réconfortant de savoir qu’une vue de la maison de mon enfance est cachée dans mon jardin d’adulte. »

– Laura Zimmerman

Saddle Butte © Laura Zimmerman

Lake Sammamish par Laura Zimmerman
Lava Flows © Laura Zimmerman
La photographe Laura Zimmerman
La photographe Laura Zimmerman

Laura Zimmerman : Site – Instagram

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Safety Cards

Safety Cards – Les consignes de sécurité vues par Arseniy Neskhodimov

Photographe russe originaire de Samarkand, Arseniy Neskhodimov est aujourd’hui installé à Moscou. À travers des projets conceptuels à l’identité visuelle singulière, le photographe explore les sentiments de désillusion, d’anxiété et d’incertitude qui s’imposent à nous, à lui. Il est notamment lauréat du concours photo Wellcome avec sa série Prozac, illustrant sa propre expérience de la dépression.

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

C’est après avoir vu le film « L’insoutenable légèreté de l’être », dont Juliette Binoche campe le rôle principal d’une photojournaliste, qu’Arseniy décide de se lancer dans cette carrière. Attiré par le fait d’être au coeur de l’action et d’événements historiques, il voyait en ce métier quelque chose de romantique qui l’attirait. Il obtient son diplôme à l’Institut de la Culture de Kemerovo (Russie) où il a étudié le cinéma et la photographie. Il travaille ensuite un certain temps comme photojournaliste. Cependant, le fait de n’être que le témoin des événements qu’il photographie et de n’avoir aucune contrôle sur ceux-là, le lasse rapidement. Arseniy se lance alors dans ses projets personnels, parallèlement à une carrière de photographe commercial pour des magazines et des publicités.

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

Safety Cards

Safety Cards illustre l’anxiété et l’incertitude dont Arseniy a fait l’expérience ces dernières années. Il a commencé à élaborer cette série avant la pandémie, durant une période où il n’était plus sûr de rien. C’est dans un premier temps sa peur de l’avion qui lui inspire l’idée de reprendre les instructions de sécurité. Il s’inspire également des livres de vulgarisation scientifique de Yakov Perelman (1882-1942). Celui-ci est très populaire auprès des soviétiques. Il est frappé par ces illustrations d’expériences , à la fois effrayantes et incompréhensibles à ses yeux, qu’il compare aux films de David Lynch.

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

La réalisation

À huit clos dans leur appartement, Arseniy et sa femme (qui joue un rôle important dans la réalisation de ce projet) mettent en place Safety Cards. Avant de photographier, ils réalisent des croquis, une sorte de plan d’action, rassemblés sur des feuilles A4. Celles-ci sont par la suite accrochées sur les murs de leur cuisine. Ainsi, le projet est partout, constamment visible, et les objectifs ne sont jamais perdus de vue.

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

Ils restent chez eux durant six mois, sans jamais sortir, sauf pour jeter les ordures du ménage. Les images de la série sont ainsi toutes prises dans leur appartement de l’époque, leur cocon, leur studio. Ils se fixent pour objectif de prendre 2 à 3 photos par semaine. Héritage de son parcours, entre cinéma et photographie, Arseniy joue avec la lumière pour apporter un côté cinématographique à son histoire. Ses images paraissent alors tout droit sorties d’un film. Nous plongeons ainsi totalement dans l’histoire, dans la folie du personnage, ses angoisses et ses désillusions.

L’histoire d’une personne qui, assise chez elle, devient littéralement folle. Pour ne pas devenir fou, je faisais cette histoire pour rester sain d’esprit.

Arseniy Neskhodimov

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

Une photo particulière

Nous avons demandé à Arseniy s’il y avait une photo, parmi cette série, qui était particulière à ses yeux. Une question très difficile pour le photographe, qui voit en chacune d’elles quelque chose de spécial. Pour lui, c’est avant tout une histoire, dont chaque élément est nécessaire. Ce projet marque une période singulière pour le photographe et sa femme. Lors de la réalisation de Safety Cards, ils n’avaient plus de travail, ils restaient constamment dans leur appartement. Mais au-delà de leurs situations personnelles, le monde était à l’arrêt. La pandémie touchait tous les pays, tous les foyers, tous les esprits.

Il n’y avait pas une âme dans la rue. Tout était fermé. C’était comme la fin du monde. Mais je n’étais pas seul. Chacun avait sa propre fin du monde. Nous n’étions pas seuls.

Arseniy Neskhodimov

Safety Cards
© Arseniy Neskhodimov

S’il devait tout de même choisir une photo, il y en a bien une plus étonnante que les autres. Il s’agit du coucher de soleil vu depuis sa fenêtre, se reflétant sur l’immeuble d’en face. Il a essayé de reproduire cette photo, en vain. Ce n’était jamais pareil.

J’ai été frappé par le fait que ce coucher de soleil ne s’est reflété qu’une seule fois et que je ne pourrai peut-être jamais le revoir. C’est probablement la seule photo non mise en scène de cette histoire que je ne peux pas refaire.

Arseniy Neskhodimov

Arseniy Neskhodimov : SiteInstagram

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couverture agenda photo

Agenda Photo Février 2022

Que faire et voir au mois de février ? Rien que pour vous, voici notre agenda sur-mesure pour les amoureux de la photographie ! Expositions photo, concours, publications littéraires… Découvrez nos idées de sorties pour un moment de libre le week-end ou la semaine. Toutes les informations dont vous avez besoin afin de profiter de chacune des opportunités culturelles qui vous sont proposées proches de chez vous ce mois-ci.

couverture agenda photo

Expositions photo

Et si nous commencions avec notre sélection d’expositions consacrées à la photographie ? Une exposition, c’est l’occasion de prendre quelques heures pour soi ou à partager et de plonger dans l’univers artistique d’un photographe. Vous y découvrez ainsi une vision du monde, un regard particulier. Entre découvertes, émotions, admiration et invitations au voyage, voici ce que vous pourrez voir en février.

Le Monde de Steve McCurry

expo agenda photo

 

 

 

Depuis le 9 décembre 2021 et ce jusqu’au 22 mai 2022, la rétrospective la plus complète dédiée au photographe américain Steve McCurry s’installe au Musée Maillol à Paris. L’exposition nous emmène aux côtés du reporter dans ses plus beaux voyages, de l’Afghanistan à l’Asie du Sud-Est, en passant par l’Afrique et l’Amérique latine. Découvrez ses clichés les plus célèbres, mais également les histoires derrière ceux-ci.

Angst de Soham Gupta
expo agenda photo
Angst de Soham Gupta

 

 

 

Rendez-vous à la Maison Doisneau pour découvrir l’œuvre photographique de Soham Gupta. Le photographe explore la condition humaine à travers les habitants de la Calcutta, en Inde. Il y aborde ainsi ouvertement la solitude, l’abandon, l’abus, la douleur… Soham Gupta met ainsi en lumière la vulnérabilité d’une part de la population, souvent invisible aux yeux du Monde. L’exposition est présente jusqu’au 30 avril 2022.

Gaston Paris, reporter. La photographie en spectacle

expo agenda photo

 

 

Du 19 janvier au 18 avril 2022, le Centre Pompidou accueille l’œuvre photographique de Gaston Paris. Reporter longtemps resté dans l’ombre, l’exposition vous amène à découvrir son univers, influencé par le surréalisme et les années folles. Il a notamment photographié la libération de Paris et visité l’Allemagne après la seconde guerre mondiale pour enquêter sur la destruction du pays. Mais il a également réalisé des clichés d’artistes tels que Brigitte Bardot, Édith Piaf ou encore Henri Salvador.

To the Water de Soo Burnell

expo agenda photo

 

 

 

L’hôtel Molitor reçoit les photographies des plus belles piscines d’Europe réalisées par la photographe Soo Burnell. Jusqu’au 20 février, venez découvrir l’œuvre de la photographe écossaise, qui n’a pas choisi le Molitor et sa mythique piscine par hasard. Soo Burnell s’inspire en effet des architectures singulières de lieux tels que celui-ci et part, depuis 2018, à la recherche de nouvelles piscines à immortaliser, à travers toute l’Europe.

Raymond Depardon et Kamel Daoud. Son oeil dans ma main. Algérie 1961-2019

expo agenda photo

 

 

 

Le 8 février prochain, L’institut du Monde Arabe accueille un témoignage unique sur l’Algérie de 1961 puis de 2019, à travers les regards d’un photographe reporter français et d’un journaliste et écrivain algérien. À l’approche du 60ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, vous découvrirez 80 photographies de Raymond Depardon et cinq textes inédits de Kamel Daoud.

Patrick Zachmann. Voyages de mémoire

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Patrick Zachmann mène une longue « enquête » sur les juifs de France, à la recherche de sa propre identité. Le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme accueille plus de 300 clichés du photographe, pris de 1970 à 2015 ainsi qu’un film, La Mémoire de mon père. Patrick Zachmann va saisir les différentes facettes de la judaïcité française durant plusieurs décennies. Il va également réaliser de nombreux reportages poignants hors de France.

Pamela Tulizo. Face to Face

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Lauréate en 2020 du Prix Dior de la Photographie et des Arts Visuels pour Jeunes Talents, Pamela Tulizo expose à la MEP jusqu’au 13 mars 2022. Avec Face to face, elle questionne le regard posé sur les femmes de son pays, la République démocratique du Congo.

The Day May Break de Nick Brandt

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Polka Galerie nous dévoile pour la première fois en France la nouvelle série de Nick Brandt. The Day May Break est présente jusqu’au 12 mars 2022. Le photographe britannique y explore l’impact des désastres climatiques et écologiques sur les espèces animales et les êtres humains du monde entier.

Paparazzi de A à Z de Daniel Angeli

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Jusqu’au 27 février 2022, le Toit de la Grande Arche de la Défense expose les grands clichés, volés ou officiels, du photographe des stars, Daniel Angeli. Pour la première fois, plus de 200 clichés du photographe seront exposés, dont de nombreux inédits.

Les Portraits de Judith Joy Ross

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Le Bal exposera à partir du 17 février 2022 l’œuvre de Judith Joy Ross. La photographe américaine capture essentiellement des portraits d’inconnus de tous horizons depuis les années 80. Au hasard des rues, Judith Joy Ross immortalise autant l’innocence des jeux enfantins que l’engagement politique ou le deuil.

Chefs-d’oeuvre photographiques du MoMA

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Le Jeu de Paume ouvre ses portes, jusqu’au 13 février 2022, à plus de 230 images appartenant à la collection moderne du MoMA. Pour la première fois hors de New-York, découvrez les œuvres d’une centaine de photographes ayant participé à l’histoire de l’invention de la modernité en photographie.

Fake World par Jean-Marc Yersin et Sébastien Pageot

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À Aix-en-Provence, la galerie Parallax accueille sa première exposition de l’année, du 5 février au 2 avril 2022. Celle-ci vous plongera dans des mondes parallèles imaginés par les deux photographes Jean-Marc Yersin et Sébastien Pageot.

MIRKINE par Mirkine : photographes de cinéma

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La ville de Nice et son Musée Masséna célèbrent les belles années du cinéma au travers de l’exposition Mirkine par Mirkine : photographes de cinéma du 18 décembre 2021 au 15 mai 2022. Découvrez plus de 250 tirages, des œuvres originales comme des archives inédites, dans une fresque esthétique et historique immortalisant un demi-siècle du cinéma français.

Hinders de Idan Wizen

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Idan Wizen sera à Strasbourg du 04 au 27 février 2022 pour présenter sa nouvelle exposition Hinders à la Chouette Galerie d’Art. L’artiste photographe franco-israélien aborde dans ses photographies différentes problématiques sociétales et décrit, de manière subtile et onirique, une ode au libre arbitre.

Jean Dieuzaide : 60 ans de photographie

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À Toulouse, retrouvez l’exposition rétrospective consacrée au photographe français Jean Dieuzaide à l’occasion du centenaire de sa naissance. Installées au Couvent des Jacobins, vous y découvrirez plus de 200 œuvres et archives, parfois inédites.

Concours photo

Vous aimez la photographie et vous souhaitez confronter votre travail à celui d’autres photographes ? Le mois de février marque l’ouverture du VIF à l’occasion du Festival le Grand Concours ! Cette année, nous découvrirons vos plus beaux clichés sur le thème « La joie est en tout, il faut savoir l’extraire« . Alors à vos appareils ! Vous avez jusqu’au 28 février 2022 avant minuit pour soumettre une série de 10 photos. Ensuite, le jury d’exception, composé de professionnels et d’amateurs à l’œil aiguisé, départagera les lauréats de ce grand concours.

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Librairie

La photographie, on la retrouve aussi et surtout dans les livres ! En février, si vous aviez un livre à acheter, ce serait lequel ? Nous, on a déjà nos petites idées…

  • Nous vous avons déjà parlé de Contes du Nord, le tout premier livre photo du street photographe Romain Ruiz. Il y conte le quotidien des habitants du Nord-Pas-de-Calais, toujours à la recherche de l’insolite et l’exubérant dans les situations qu’il rencontre.
  • À l’occasion de l’exposition sur son œuvre, redécouvrez pleinement le photographe Gaston Paris à travers l’ouvrage du même nom. L’ouvrage consiste en un témoignage exceptionnel de l’évolution de la société de l’entre-deux-guerres.

Avec tout ça, le mois de février ne manquera pas de nous apporter surprises et émotions.

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